Natif de la Médina, le chanteur et compositeur, El Hadji Keïta, a tout naturellement choisi de suivre les pas de l’enfant chéri de la Médina, son idole, Youssou Ndour. Dans cet entretien, il évoque l’influence que le chanteur a eue sur sa carrière qui, du reste, n’aurait pas dû démarrer puisque Elaj Keita n’était pas destiné à chanter.
Comment êtes-vous arrivé dans la musique ?
J’ai commencé à pratiquer la musique en 2008. Tout est parti d’un casting où il y avait trois cents personnes. C’était à Yeungoulen (boite de nuit de Dakar). J’ai fait partie du top 10 puis du top 3. J’ai ensuite séjourné au Mali, chez la grande chanteuse Babany Koné. J’assurais ses premières parties et j’ai réalisé un clip avec elle, ainsi que des featuring. A mon retour du Mali, j’ai décidé de mettre en place mon groupe. C’était vers 2008-2009. Ce groupe musical portait le nom de Téété, qui est un mot wolof qui renvoie à l’enfant que l’on guide, qu’on aide à faire ses premiers pas. J’ai aussi eu la chance de participer au concours L’Afrique a un incroyable talent, avec une place de demi-finaliste, en Côte d’Ivoire. Dans les normes, je ne devais pas chanter. Je suis issu d’une famille noble. Je devais me contenter qu’on chante pour moi mais je n’ai pas voulu le faire. Ce qui me lie à la musique est très fort et la connexion s’est faite par le biais de mon père Siaka, qui était un chanteur traditionnel mandingue, et de mon homonyme, qui jouait de la Kora. Je tiens d’eux ma passion pour la musique. Je ne suis pas un griot, mais j’avoue que je ne peux pas me détacher de la musique. Ce n’est pas diffèrent de Salif Keïta, qui est un Keïta comme moi et qui pouvait ne pas s’adonner à la musique.
Quel est votre genre musical de prédilection ?
Je fais de la variété musicale. Je chante sur toutes les gammes. Je peux poser ma voix sur un rythme kora, xalam, etc. Je joue aussi de la guitare et je suis auteur-compositeur. Je compose tous mes morceaux, je fais mes propres accords. Personne ne peut me tromper dans la musique. Je donne l’impression de ne faire que du mbalax mais c’est pour cacher mon jeu. Je ne veux pas me découvrir car si tout le monde connaît ta destination, tu n’y arriveras jamais. L’adage dit que pour vivre heureux, il faut vivre caché. Je veux m’investir d’abord dans le mbalax avant de révéler ce que je peux faire à travers les autres genres musicaux. Il y a quelques jours, j’ai joué avec l’Orchestre national et Demba Guissé. La musique traditionnelle est un genre où j’excelle aussi.
Mais vous, presque toutes vos chansons parlent d’amour et de sentiments…
Pourtant je n’ai que trois titres qui traitent de l’amour. Ce sont Chérie, Wouyouma et Var. Tous les autres traitent des réalités sociales. Ce sont des chansons qui participent à l’éveil des consciences. Une parole qui n’éveille pas comme on a l’habitude de dire, ne peut tromper sa cible. Je m’investis pour donner le meilleur de moi-même en faisant de la recherche musicale. Si on ne fait pas de la recherche musicale, les autres ne se feront pas prier pour le faire. Mieux vaut donc faire des efforts dans ce sens. Si vous écoutez mes chansons, vous vous rendrez compte de la différence par rapport à ce qui se fait ailleurs. Chacun se bat de son côté, l’ambiance ne devrait pas prendre le dessus sur le contenu des textes qui devraient renfermer des paroles qui éveillent. Le chanteur doit éduquer et éveiller les masses. On devrait, nous de la jeune génération, marcher sur les pas de nos aînés pour arriver à ce qu’ils ont réussi à faire dans la musique. Vous tirerez beaucoup de leçons des chansons que j’ai faites avec Mbaye Dièye Faye.
Parlez-nous de votre père et de votre homonyme, tous deux musiciens ?
Mon père, Issakha Keïta, est plus connu sous le nom de Siaka Keïta. C’est un chanteur traditionnel mandingue. Mon père est décédé le jour où je suis allé à Bercy pour le spectacle de Pape Diouf. Ma famille m’a caché la triste nouvelle et je ne l’ai apprise qu’à travers un message que m’a envoyé quelqu’un pour présenter ses condoléances. Je prie pour le repos de son âme. On le connaît dans le milieu de la musique traditionnelle, notamment à l’Orchestre national. Quand à mon homonyme, c’était un koriste, fils de Mamadou Kouyaté. Il jouait de la kora, un instrumentiste hors pair qui jouait pour le Président Senghor et les autres présidents du Sénégal. Mon homonyme n’est plus de ce monde. Il est décédé en France lors d’une tournée qu’il était parti effectuer là-bas. C’est l’homonyme de Soriba, qui est aussi chanteur. Je suis le premier homonyme de Soriba. J’ai été le premier désigné pour être l’homonyme de Soriba avant que Soriba Kouyaté, qui est mon frère, ne porte son nom. Je suis né au Sénégal mais je suis sénégalo-malien. Mon père est malien, ma mère est peule sénégalaise et je suis né à la Médina.
Peut-on connaitre vos projets musicaux ?
Je suis en train de travailler dans le cadre de la sortie d’un album dont je tairai le titre. Ce sera un album de huit titres, et la sortie est prévue pour bientôt. Nous sommes en train de réfléchir sous quel format nous allons le sortir, sur des clefs Usb ou des plateformes de téléchargement. Parce que l’heure est à la résilience, les albums ne se vendent plus. Tous mes clips auparavant étaient diffusés sur les chaînes YouTube des labels avec lesquels je travaillais. Mais là, je viens de créer ma propre chaîne YouTube et même si je collabore avec d’autres structures, je pourrai toujours mettre mes productions dans ma propre chaîne. Les albums ne se vendent plus comme avant.
Vous travaillez toujours avec votre producteur, Mbacké Dioum ?
Le contrat avec Mbacké Dioum est arrivé à son terme. C’était un contrat qui pouvait être renouvelé. Mbacké Dioum est un père pour moi. Je ne le considère pas seulement comme un producteur, nos relations dépassent cette étape.
Vous avez une référence dans la musique ?
Je suis de la Médina, papa Youssou Ndour est ma référence. Il m’a dit que j’incarne l’espoir et est venu me soutenir au Grand Théâtre, quand je me suis produit là-bas pour la première fois. Youssou Ndour sait que je chante bien. Lors de l’une des éditions des Cauris d’or organisés par Mbagnick Diop, j’ai fait un clip avec J Kim qui porte le titre de Namna lou may doohé. C’est un chanteur de renommée internationale. Si l’on croit en Dieu, on peut réussir tout ce que l’on entreprend même si l’argument du manque de moyen est toujours évoqué.
Comment a été votre parcours scolaire ?
Je me suis arrêté en cinquième secondaire. J’ai fréquenté le Lycée commercial Delafosse. Je n’ai pu aller au-delà de la classe de cinquième secondaire car la musique a pris le pas sur mes études.
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