L’affaire Ousmane Sonko accusé par le député Matar Diop de la mouvance présidentielle d’avoir reçu 12 milliards FCFA de bailleurs intervenant dans le secteur de l’exploitation du pétrole et du gaz relance le débat sur la question du financement des partis politiques.
Le financement des partis politiques devient un vieux serpent de mer qui ressort chaque fois à l’approche des échéances électorales. Maintes fois agitée mais jamais matérialisée au Sénégal, la problématique du financement des partis politiques sur fonds publics permettrait, selon bien d’acteurs politiques, de mettre de l’ordre dans le jeu politique.
A condition que toutefois cette dotation soit réglementée, transparente et soutenue par… une volonté politique affirmée de l’Etat, toute la classe politique sénégalaise est favorable au financement des partis, mais l’Etat rechigne à matérialiser ce vœu pour des raisons tout à fait obscures.
Les supposés fonds substantiels reçus par le maire de Ziguinchor de la part de bailleurs étrangers, en échange de la promesse de renégocier les contrats pétroliers et gaziers du pays relance le débat sur une loi encadrant le financement des partis.
Robert Bourgi, Monsieur Afrique avait mis en lumière une pratique de financement occulte des partis politiques dite « des valises » de la « Françafrique ».
En quoi consiste ce système ? Le système des valises, pile d’argent liquide remontée des pays africains aux partis politiques français, peut s’apparenter à un échange de bons procédés.
D’un côté, les dirigeants africains fournissent des fonds (pouvant se chiffrer à plusieurs millions) pour le financement des campagnes électorales françaises. De l’autre, les hommes politiques français s’engagent, une fois élus, à assurer la stabilité de ces Etats « amis ».
A quoi servait ce système ? – Pour résumer, il s’agit d’une « sorte d’assurance tous risques » pour les dirigeants africains incluant la sécurité personnelle du donateur jusqu’à la défense de son pays avec l’installation de bases militaires françaises.
Les politiques français s’engageaient aussi à fermer les yeux sur les petites et grandes dérives de leurs protégés, qu’elles soient personnelles ou qu’elles visent p- par exemple – à censurer leurs opposants politiques.
Bref, ce sont des gens sur lesquels la République se repose, quand ses propres réseaux sont impuissants », expliquait à Europe1.fr Frédéric Lejeal, spécialiste de l’Afrique et rédacteur en chef de La lettre du contient. Hommes de l’ombre, ils peuvent – comme Robert Bourgi l’affirme – servir de messagers pour des financements occultes.
UN SYSTEME VIEUX DE PLUS DE 60 ANS
Quand cela a-t-il débuté ? – « On suppose que ce système de financements a débuté pendant la Seconde Guerre mondiale. Des réseaux se sont alors mis en place avec les dirigeants de la France libre », raconte Frédéric Lejeal avant d’ajouter : « Ces pratiques ont ensuite servi à financer la politique française, pendant des années, toutes couleurs confondues ».
Ce système perdure-t-il ? – « Les réseaux de la Françafrique se sont délités. Aujourd’hui, ils sont déstructurés et ne sont plus indispensables pour les dirigeants africains. Ils n’existent plus sous la même forme », juge le rédacteur en chef de La lettre du continent.
« Les lois passées dans les années 1990 – qui assurent un contrôle plus rigoureux des finances des partis et plafonnent les dons par personne (lire notre article : comment se financent les partis)- ont bien changé la donne« , poursuit-il.
Mais l’ex-chiraquien Jean-François Probst est d’un autre avis.
Lundi, il affirme dans Le Parisien que ce système a perduré, au moins jusqu’à la dernière campagne électorale. « Robert Bourgi s’est dépensé sans compter pour Sarkozy auprès de nombreux chefs d’Etats africains lors de la présidentielle de 2007 », accuse-t-il.
Il « a refait un deal avec Omar Bongo, qui lui aurait donné – dit-on – 1 milliard de francs CFA », a encore assuré Jean-François Probst, grand habitué, comme Robert Bourgi, des capitales africaines.
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