Deux semaines après le lancement officiel de la 15e Biennale de Dakar, placée sous le thème «The Wake ou L’éveil», la Directrice artistique Salimata Diop a fait une revue à mi-parcours. Sur la chaîne de la Biennale, elle est revenue sur les défis et les transformations artistiques qui caractérisent cet événement.
La 15e Biennale de l’art africain contemporain de Dakar (Dak’Art) a débuté depuis le 7 novembre dernier. Dans un entretien filmé avec l’équipe de presse de la biennale, la Directrice artistique Salimata Diop exprime sa satisfaction envers les équipes qui ont rendu cet événement possible malgré les difficultés.
«On a eu un contexte particulièrement difficile pour monter cette édition.
Et les équipes ont dû redoubler de passion et d’investissement dans leur travail. Elles sont allées beaucoup plus loin que leurs missions», a déclaré Mme Salimata Diop. Directrice artistique de l’événement, par ailleurs critique d’art et commissaire d’exposition, elle estime qu’au-delà des obstacles, le travail de ces équipes semble avoir payé, puisqu’il y a déjà des retours positifs de la part du public, de plus en plus nombreux sur les lieux du «In» de l’exposition. «On voit tous les âges, tous les backgrounds. Et ça déjà, c’était un objectif.
On a eu des retours assez extraordinaires, des personnes qui ont partagé une émotion, une fierté très forte.
Je me réjouis de voir que le public se rend sur les différents lieux du In, de voir que c’est un public mixte», se réjouit-elle.
Une programmation en cours… Evidemment, il est encore tôt pour dresser un bilan définitif de l’événement.
«C’est plutôt difficile d’émettre un jugement quand on n’a pas vraiment de recul. Je suis dans la biennale, je suis encore dedans et il y a une programmation qui est encore en cours. Je travaille avec une grande partie de l’équipe. Mais, c’est très positif», admet-elle. Cependant, l’un des éléments les plus marquants de cette biennale reste la transformation de l’ancien Palais de justice du Cap Manuel qui a vu se dérouler des procès historiques.
Salimata Diop, qui connaît le lieu depuis longtemps, se souvient de ses premières impressions.
«La transformation de l’ancien Palais de justice, c’est une longue histoire qui commence bien avant cette édition, parce que c’est un lieu, en tant que Sénégalaise, en tant que Dakaroise, que je connais depuis longtemps. C’est un lieu qui existe dans mon imaginaire depuis des années et que j’ai vu avec différentes visions artistiques», a-t-elle expliqué.
A ses yeux, ce lieu est bien plus qu’un simple espace d’exposition.
Il incarne une histoire complexe et plusieurs strates de signification. L’édifice qui était un palais de justice colonial, a marqué l’âme du lieu, créant une atmosphère particulière qu’elle qualifie de hantée.
«Quand je suis revenue, étant nommée Directrice artistique, la première chose que je me suis dite, c’est que c’était un palais hanté.
Et il est hanté aussi par tout ce qu’il y a eu avant, par les précédentes éditions. Il y a eu des installations extrêmement marquantes qu’on n’oubliera jamais», fait-t-elle savoir, tout en précisant que c’est un palais «compliqué» parce qu’il y a un côté «labyrinthique». «Il a des lignes architecturales très dures dont la symétrie. Il fallait placer des œuvres de façon à ce qu’elles soient mises en valeur, mais aussi de façon à ce qu’elles mettent en valeur le palais.
Et c’est toute cette conversation qui a été assez délicate à mettre en place», dira-t-elle.
Toutefois, le défi de Salimata Diop et de son équipe a été de transformer cet espace imposant en un lieu d’échange et de créativité, tout en respectant son histoire. Elle rappelle d’ailleurs que l’édifice n’a pas été conçu à l’origine pour être un lieu ouvert à la culture, mais pour imposer une certaine puissance coloniale.
«C’était un réel palais de justice.
Donc, ce n’est pas un bâtiment qui est conçu à l’époque par les architectes pour être un lieu accueillant, un lieu ouvert à tous, pour être un lieu d’échange. Pas du tout. C’est presque l’inverse. C’est un lieu qui a été conçu pour montrer une puissance coloniale, pour intimider, voire pour être écrasant. Et il fallait le transformer», a-t-elle conclu.
Lequotidien