Au Sénégal, la pratique de l’évaluation n’est pas aussi récurrente qu’elle le devrait, vu le rôle crucial qu’elle peut jouer pour l’efficacité et l’efficience des interventions, surtout, de l’Etat au profit des populations.
Ceci est le constat d’experts qui en ont fait écho lors d’un atelier de sensibilisation et de renforcement des capacités de journalistes, tenu les 10 et 11 décembre 2024 à Thiès.
Depuis son accession à la tête du Sénégal à l’issue de l’élection présidentielle du 24 mars 2024, on est habitué au fait que le président Bassirou Diomaye Faye demande l’évaluation de programme et/ou projets portés par le gouvernement. Hier encore, en Conseil des ministres, il a demandé une évaluation.
Le chef de l’Etat « a invité le premier ministre à finaliser l’évaluation de toutes les initiatives, de tous les programmes, projets et dispositifs publics de promotion de l’employabilité et de l’emploi des jeunes (…) », rapporte le communiqué du Conseil des ministres tenu ce 11 décembre.
Pourtant, des experts en la matière ont senti la nécessité de « promouvoir la culture et la pratique » de l’évaluation au Sénégal.
Car, le constat est que la pratique de l’évaluation des politiques publiques n’est pas trop développée dans le pays. C’est pourquoi d’ailleurs le vice-président de l’Association sénégalaise d’évaluation (SenEval) a indiqué qu’ils sont dans une « dans une phase de plaidoyer aussi au bien niveau exécutif que parlementaire ».
« Nous voulons aider à ce que la pratique de l’évaluation soit un comportement naturel dans nos différentes institutions », a dit Ibrahima Ba.
Dans une présentation, Abdoul Aziz Kane, expert en évaluation des politiques publiques a souligné que celle-ci permet essentiellement de porter un jugement de valeur sur un objet, à partir d’informations méthodiquement recueillies et qui permettent d’améliorer ce qui est évalué.
Il a soutenu que les bailleurs demandent systématiquement, dans le cadre des projets qu’ils accompagnent, qu’on trouve un responsable suivi-évaluation.
Pour M. Kane, il ne faut pas attendre à ce que le président de la République demande une évaluation pour qu’on la fasse. « L’évaluation doit se faire naturellement », a-t-il ajouté.
M. Kane qui a cité une « une récente étude sur l’analyse du dispositif institutionnel de l’évaluation au Sénégal » faite par deux consultants, a soutenu que ladite étude a montré « une faible institutionnalisation de la fonction d’évaluation au sein de l’administration publique ». Il ressort de cette étude aussi que « la demande en évaluation de la part de l’Etat est faible et que ce constat s’explique principalement par un déficit en ressources humaines et financières ».
A en croire M. Kane, il est constaté une demande forte de la part des bailleurs de fonds et croissante du côté des organisations de la société civile qui exigent, de plus en plus, une reddition de comptes de l’action publique. Il a relevé que l’offre de service d’évaluation est assez forte notamment en matière en de ressources humaines avec les cabinets et les consultants mais, selon lui, le secteur est peu organisé.
Par Pr Sémou Sow, expert en évaluation est revenu sur la notion de suivi qui, selon lui, intervient pour améliorer la performance d’un programme et la qualité des réalisations, apprendre des expériences du terrain, pour identifier des mesures correctives éclairées, prendre les bonnes décisions et s’assurer d’obtenir les résultats escomptés et planifiés lors de la formulation du projet.
Il a rappelé dans la foulée que l’évaluation est conçue pour plusieurs utilisations comme la prise décision, l’amélioration des interventions, la production de connaissances, l’apprentissage etc. L’évaluation répond généralement à trois finalités démocratique, stratégique et opérationnelle.
Pour sa part, le représentant du Fonds des Nations unies pour l’enfance (Unicef), partenaire de SenEval, a jugé crucial e fait de sensibiliser et de promouvoir la culture et la pratique de l’évaluation. Mouhamadou Fall a confié cette activité de formation s’inscrit dans le cadre de « permettre aux populations de mieux comprendre ce que les gens font y compris l’Unicef ».
Pour lui, « il est important quand on fait une politique, qu’on essaie de comprendre s’il y a des améliorations à des faire, des impacts sur la population pour décider s’il faut répliquer cette politique ou pas ».
Bassirou MBAYE
Actu-Economie