Ils sont 21 candidats à passer l’étape du parrainage. Il reste à franchir l’autre cap, celui de l’examen des autres pièces du dossier de candidature. Le Conseil constitutionnel va donc statuer sur la nationalité, le casier judiciaire, entre autres.

Il y a 3 candidats dont les dossiers retiennent l’attention : Karim Wade sur son amende de 138 milliards et sa double nationalité, Khalifa Sall qui a pourtant payé son amende et Bassirou Diomaye Faye, un candidat en prison pour les mêmes chefs d’inculpation contre son mentor, Ousmane Sonko.

Khalifa Sall et Karim Wade ont été «libérés» par le dialogue politique auquel ils ont participé. L’objectif avoué était, entre autres, de trouver les voies et moyens de restaurer leur éligibilité, après avoir raté la Présidentielle de 2019.

Le samedi 5 août 2023, les députés adoptent, par 124 voix contre une, le projet de loi N°12/2023 modifiant la loi N°2021-35 du 23 juillet 2021 portant révision du Code électoral. Une modification, qui, en ses articles L.29, L.31 et L.57 permettent à ces deux candidats déclarés de retrouver leurs droits civils et politiques.

L’ancien maire de Dakar, rappelle-t-on, avait écopé d’une peine 5 ans de prison ferme assortie d’une amende de 5 millions de FCFA. Alors que l’ancien ministre d’Etat, ministre de la Coopération internationale, de l’Aménagement du territoire, des transports aériens et des infrastructures avait été condamné à six ans de prison ferme et 138 milliards de francs CFA d’amende pour enrichissement illicite.

Pour ce qui concerne Khalifa Ababacar Sall, le décret 2019-1589 du 29 septembre 2019 qui l’a gracié dispose en son article premier qu’«une remise totale des peines principales est accordée aux condamnés» dont lui.

Mais, en dépit de la modification du Code électoral, des spécialistes sont convaincus que l’amende pourrait être un motif de rejet de sa candidature tout comme celle de Karim Wade.

Dr Mamadou Salif Sané : «L’amende peut être une entrave à la candidature de Karim et Khalifa»

Dr Mamadou Salif Sané, maitre de conférences à l’Ufr des sciences juridiques de l’université Gaston Berger explique : «L’amende est versée au trésor public et elle appartient à la société. Elle peut constituer une entrave à la candidature à la fois de Karim Wade et de Khalifa Sall. S’ils doivent quelque chose au trésor public, ils doivent payer.

Pour pou- voir se présenter à l’élection présidentielle, la per- sonne doit déclarer sur l’honneur qu’elle ne doit rien au trésor, qu’elle est en règle avec le fisc.

Mais le Conseil constitutionnel dispose d’un pouvoir d’appréciation pour le respect de leurs droits fondamentaux d’être électeur et d’être éligible. Peut-être, le Conseil trouvera les moyens de valider leurs candidatures. Mais en principe, l’amende constitue une entrave.»

Ndiaga Sylla : «L’amende ne peut pas empêcher Karim et Khalifa d’être candidats»

L’expert électoral, Ndiaga Sylla, invité du Jury du dimanche, le 31 décembre dernier, avait pourtant dissipé les crain- tes. «D’abord interrogeons le décret qui a gracié Khalifa Sall. Il est claire- ment dit qu’il est gracié à la fois de ses peines d’emprisonnement et de ses peines d’amende.

Et le Code électoral modifié en son article 28 dit que quel- qu’un qui bénéficie d’une grâce présidentielle doit rester la période prévue pour la condamnation initiale. Par exemple, pour Khalifa Sall c’était 5 ans.

Pour la peine d’amende, c’est le même Code électoral modifié qui dit que si quelqu’un a été condamné à une peine d’amende pour retrouver son droit de vote doit rester une période de 3 ans pour être éligible. Donc, si on considère ces dispositions, Khalifa Sall devient éligible», a-t-il conclu.

Mais le candidat de Taxawu Sénégal ne voudrait prendre aucun risque de se faire surprendre.

C’est pourquoi, selon Le Quotidien dans son édition du 11 octobre 2023, il a payé l’amende de 5 millions qui lui avait été infligée dans le cadre de l’affaire de la caisse d’avance de la Ville de Dakar.

Pour le volet de l’amen- de, le cas Karim Wade est plus complexe. Il se susurre que ce «doute» retarde le retour de l’exilé du Qatar. Contrairement à Khalifa Sall, le décret n° 2016-880 du 24 juin 2016 graciant le fils du Président Wade précise en son article 2 que «la grâce ainsi accordée dispense seulement de l’exécution des peines d’emprisonnement restant à subir».

Ci-gît toute l’interprétation et même la crainte pour Wade-fils.

Là aussi, Ndiaga Sylla est convaincu que l’amende de 138 milliards FCFA non payée de Karim Wade ne devrait pas être un motif d’invalidation de sa candidature. «Le décret de grâce de Karim Wade dit que M. Karim Wade est exempté de la peine d’emprisonnement mais pas du paiement de l’amende.

Sauf que mainte- nant, on ne peut pas appliquer l’article L28 qui prévoit une période de 3 ans, mais plutôt l’article L30 qui règle le cas Karim.

Cet article dit que ne peuvent être inscrites sur les listes électorales, à partir de la condamnation définitive, les personnes condamnées pour un certain nombre de délits pour une durée moindre. Cette disposition finit par dire toute personne condamnée à une peine d’amende supérieure à 200 000 francs.

Or, Karim Wade est dans cette situation puisque c’est à coup de milliards.

La condamnation définitive de Karim Wade est intervenue en 2015 alors qu’on est en 2023», a dit l’expert électoral. Qui relève une différence entre l’amende en tant que peine prononcée par le juge et l’amen- de retenue par le Code des impôts.

Il en déduit qu’«aujourd’hui, juridiquement, l’amende infligée à Khalifa Sall et Karim Wade ne peut pas les empêcher d’être candidats». C’est là, l’une des grosses attentes sur la liste définitive du Conseil constitutionnel le 20 janvier prochain.

emedia

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