Barrage d’Affignam : Les populations de Bignona (Sénégal) réclament l’ouverture d’une embouchure pour sauver leurs rizières et relancer la production

Les habitants du département de Bignona, dans le sud du Sénégal, ont exprimé leur mécontentement face aux conséquences de la construction du barrage d’Affignam, en particulier sur leurs rizières et les ressources naturelles locales. Le 21 janvier 2024, une mobilisation a eu lieu à Affignam, dans la commune de Mangagoulac, afin de demander l’ouverture d’une embouchure pour permettre la régulation naturelle des marées et sauver les terres agricoles gravement affectées par le barrage.

Le barrage d’Affignam, construit en 1983 sous l’administration de l’ancien président Abdou Diouf, avait été conçu pour protéger la vallée de Bignona contre l’intrusion de l’eau salée de l’océan, favorisant ainsi l’agriculture dans la région. Cependant, après sa réhabilitation en 2020 grâce à un financement du gouvernement chinois, des problématiques environnementales et socio-économiques ont émergé, affectant la vie des habitants.

Les impacts négatifs sur les rizières et les écosystèmes locaux

D’après Dème Diatta, le porte-parole des populations locales, le barrage d’Affignam a provoqué des effets dramatiques pour les habitants du village d’Affignam et du département de Bignona dans son ensemble. Les rizières, autrefois source de subsistance essentielle pour les familles, ne produisent plus comme avant. Les puits se sont asséchés, les terres sont devenues stériles et l’environnement, notamment les mangroves et les arbres, a été largement dégradé.

« Nos rizières ne produisent plus, nos puits n’ont plus d’eau, nos terres sont devenues arides.

Nos arbres, tout comme la mangrove, ont disparu », a déploré Dème Diatta. Selon lui, la situation s’est détériorée au point où la population ne voit plus de poissons dans les eaux de la vallée, un autre impact négatif de la construction du barrage.

Cela fait désormais 40 ans que les communautés vivent ces difficultés, et les habitants ont l’impression que le barrage n’a plus d’utilité pour leur quotidien. « Nous n’avons plus de poissons dans le département de Bignona, et la construction du barrage nous a causé beaucoup de torts », a ajouté M. Diatta.

Des solutions proposées par les populations

Face à ces difficultés, les populations d’Affignam demandent la construction d’un pont à proximité du barrage. Cette infrastructure permettrait de réguler les marées et de restaurer l’équilibre écologique de la vallée, notamment pour la pêche et l’agriculture.

Selon Dème Diatta, l’ouverture d’une embouchure serait une solution pour rétablir l’équilibre des écosystèmes et améliorer les conditions de vie des populations locales.

« Nous plaidons pour la construction d’un pont à côté de ce barrage d’Affignam, qui nous permettra de bénéficier d’une marée haute et une marée basse et d’avoir à nouveau des poissons », a précisé le porte-parole des populations.

Réactions et projets du gouvernement

Bilaly Keita, le directeur du barrage d’Affignam, a reconnu que la construction de cet ouvrage a généré des désagréments pour les populations. Toutefois, il a souligné que l’État a mis en place plusieurs programmes dans la vallée de Bignona pour soutenir les habitants et encourager l’agriculture durable.

« Le gouvernement a lancé le projet PROVAL-CV qui consiste en des aménagements dans la vallée.

D’ici juin 2025, les premiers aménagements seront réalisés », a rassuré M. Keita. Il a également précisé que le barrage d’Affignam joue son rôle principal en tant qu’ouvrage anti-sel, mais que les vastes potentialités agricoles de la vallée ne sont pas encore pleinement exploitées.

Appels à une collaboration pour valoriser les ressources locales

M. Keita a encouragé la population à exploiter les terres laissées en friche et à travailler de concert avec les autorités pour développer les infrastructures nécessaires à l’exploitation optimale des ressources agricoles. « Il appartient à la population de mettre en valeur ces superficies laissées en friche pour encourager l’État à faire davantage, en fournissant les infrastructures, les intrants, le matériel agricole et les structures d’accompagnement », a plaidé le directeur du barrage.

Les habitants de Bignona, tout en reconnaissant les efforts du gouvernement pour soutenir l’agriculture locale, appellent à une gestion plus intégrée et durable des ressources naturelles de la vallée. Ils souhaitent voir des solutions concrètes mises en place pour restaurer la fertilité des terres et revitaliser les écosystèmes aquatiques de la région.

Un appel à un avenir plus équilibré pour la vallée de Bignona

La situation autour du barrage d’Affignam est un exemple de la complexité des projets de gestion des ressources naturelles et de l’impact qu’ils peuvent avoir sur les communautés locales. Alors que le barrage a contribué à limiter l’intrusion d’eau salée, les conséquences inattendues sur l’agriculture et la pêche montrent la nécessité d’une gestion plus équilibrée et flexible.

Les demandes des populations d’Affignam soulignent l’importance d’intégrer des solutions locales et durables pour répondre aux défis environnementaux tout en soutenant le développement économique.

Le gouvernement, en collaboration avec les acteurs locaux, devra trouver des solutions qui permettent de concilier la protection de l’environnement et les besoins socio-économiques des communautés riveraines.

VivAfrik