Le film «Sira» de la Burkinabè, Apolline Traoré, a été projeté en avant-première à Dakar, en présence d’autorités burkinabè et de cinéphiles au cinéma Pathé Dakar. Soumission officielle du Burkina Faso aux Oscars prévus en mars 2024, le film porte sur la problématique du terrorisme et pourrait devenir un canal de sensibilisation afin de contribuer à promouvoir la paix en Afrique et surtout au niveau du Sahel.

Le monde du septième art s’était donné rendez-vous, jeudi dernier, au cinéma Pathé de Dakar. C’était à l’occasion de l’avant-première sénégalaise du film Sira, de la réalisatrice burkinabè, Apolline Traoré, coproduit par le Sénégalais, Souleymane Kébé. Sira (incarné par l’actrice burkinabè Nafissatou Cissé) est une jeune fille peule dont la tribu traverse le désert pour se réfugier au village de son fiancé, Jean-Sidi, qui l’attend pour l’épouser.

En pleine traversée, les hommes sont violemment massacrés par une bande surgie de nulle part. Le chef des agresseurs, Yéré, emmène Sira pour s’être fait humilier par elle. Violée et laissée pour morte dans le désert, Sira se retrouve seule et découvre le camp des terroristes, dirigé par Moustapha, le meilleur ami de son père et Yéré son violeur.

Entre amertume, désolation et vengeance, Sira décide de tout donner pour étouffer les plans macabres des terroristes, tandis que sans qu’elle ne le sache, son fiancé est parti à sa recherche.

Dans ce long métrage qui relate un drame profondément touchant, trois générations de femmes se révèlent aux côtés de Sira : Aïssatou, sa mère, et Kémi, adolescente kidnappée et séquestrée comme esclave sexuelle. La réalisatrice Apol­line Traoré peint la situation actuelle du Burkina et ce, dans plusieurs langues, notamment le pulaar, l’anglais et le français.

«Depuis plus d’une décennie, le Sahel souffre d’attaques terroristes et le Burkina Faso en fait partie. Alors en tant qu’artiste, notre art a une force d’aider les gouvernements et l’Armée pour dénoncer ce qui se passe dans le Sahel et surtout montrer au monde entier ce qui se passe dans mon pays», a déclaré la réalisatrice à la fin de la projection.

Dans ce film d’une durée de 2h 2 minutes, Apolline Traoré invite à la réflexion avec des thèmes majeurs comme le terrorisme, la volonté d’émancipation de la femme, la mauvaise utilisation de la religion… A travers cette œuvre cinématographique, Apolline Traoré veut faire passer un message : c’est la nécessité d’une bonne cohésion sociale sans distinction pour juguler la crise.

«L’histoire de ce film, c’est d’abord la résilience. Notre résilience au Sahel. Bien que nous soyons touchés, nous sommes peut-être à genoux, mais nous ne sommes pas tombés. Et nous allons continuer à nous battre pour sortir de là et surtout, nous devons nous aimer les uns les autres», a-t-elle déclaré, tout en admettant que c’était le film le plus difficile de sa carrière.

Tourné dans le désert de la Mauritanie, faute de pouvoir le faire au Burkina, pays de la réalisatrice, il porte la problématique du terrorisme et pourrait devenir un canal de sensibilisation afin que chacun, d’une manière ou d’une autre, puisse contribuer à promouvoir la paix en Afrique et surtout au Sahel. «Le terrorisme n’est pas à combattre avec les armes, mais avec la compréhension et l’acceptation et l’amour de chacun», avertit la réalisatrice.

Tout en se réjouissant d’avoir regardé le film, l’ambassadeur du Burkina Faso, Jacob Ouédraogo, estime que le message est passé. «Faire en sorte que le public soit davantage sensibilisé sur la réalité. Une réalité cruelle qui est vécue par les populations. Et c’est une fierté pour le Burkina d’avoir une réalisatrice de grand talent», a-t-il souligné.

«Nous devons affirmer notre identité africaine»
Présent lors de la diffusion, le Pr Maguèye Kassé a rappelé d’abord que ce n’est pas la première fois qu’il regarde le cinéma de Apolline Traoré puisqu’il a déjà vu dans le passé Fron­tières, Desrances, enfin Sira. «J’ai vu le film aujourd’hui pour la deuxième fois. Et ce qui m’a frappé surtout, c’est l’originalité de sa thématique… Elle constitue une très bonne relève pour le cinéma africain.

Notre cinéma ne peut pas être un cinéma pleurnichard, ne peut pas être un cinéma comme on le fait à Hollywood ou ailleurs. Nous devons affirmer notre identité africaine dans un média qui s’appelle aussi le septième art.»

Quant à Abdou Aziz Cissé, directeur du Fonds de promotion de l’industrie culturelle (Fopica), il estime que le film de Apolline Traoré consacre une nouvelle dynamique dans les relations cinématographiques et culturelles entre le Sénégal et le Burkina. Il rappelle qu’il n’y a pas très longtemps, pour faire un film de ce genre, les cinéastes africains étaient obligés d’aller en Europe, en France, pour trouver de l’argent.

«Aujourd’hui, de plus en plus, nos pays mutualisent leurs ressources et développent des possibilités pour faire des films ambitieux, raconter nos histoires qui sont les meilleures et qui parlent au public africain.

Et c’est la raison pour laquelle l’Etat du Sénégal, à travers le Fopica, a été très heureux de participer à cette coproduction», explique M. Cissé, tout en rappelant également que les deux pays ont signé des accords de coproduction cinématographique et de plus en plus de projets bénéficient de cette possibilité de cofinancement.

Projeté lors du dernier Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouaga­dougou (Fespaco), Sira est aujourd’hui la soumission officielle du Burkina Faso aux Oscars prévus en mars 2024 à Los Angeles, aux Etats-Unis, informe la réalisatrice.

Il y avait une forte délégation de la communauté burkinabè au Sénégal pour accueillir ce nouveau long métrage de Apolline Traoré, qui a fait sa première mondiale dans la section Panorama de la Berlinale de cette année. Sira, un film audacieux avec des images et des acteurs remarquables. A la fin de la projection, des applaudissements nourris ont salué l’œuvre cinématographique de Apolline Traoré.

Lequotidien

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