Le séquençage du coronavirus chez un patient retient uniquement le variant majoritaire, alors que plusieurs autres variants minoritaires sont aussi présents, dont certains pourraient devenir majoritaires après.

Les milliards de virions présents chez chaque personne infectée ont des séquences génétiques potentiellement différentes.

Attention, un variant peut en cacher un autre ! Le séquençage du virus à travers le monde a permis de mettre en évidence l’évolution du coronavirus et l’émergence des nouveaux variants qui se sont succédé depuis le début de la pandémie. Cependant, ces séquençages ne présentent en général que la séquence la plus nombreuse chez un individu infecté. Alors qu’en réalité, ces séquences majoritaires sont toujours accompagnées de plusieurs autres avec des modifications génétiques différentes de celles présentes dans la séquence majoritaire. Cette révélation a été faite par des chercheurs de l’Université Case Western Reserve, dans l’Ohio (États-Unis), dans un article publié le 8 septembre 2022 dans la revue Plos Genetics. Et cette découverte pourrait nous donner une longueur d’avance sur le virus et son évolution.

Une grande diversité génétique
Les chercheurs ont étudié en profondeur les séquences de SARS-CoV-2 présentes chez 254 patients mettant en évidence une grande diversité génétique du virus dans chacun des patients (254 patients recrutés pour cette étude, plus 110 provenant de bases de données internationales). Un total de 1.096 positions de la séquence d’ARN du virus présentaient au moins une modification différente de celle dans la séquence majoritaire, dont 406 étaient observées dans plusieurs patients (75 d’entre elles chez plus de 10 patients).

Des mutations invisibles
Parmi ces 75 mutations alternatives les plus fréquentes, 30 n’étaient majoritaires chez aucun de patient. C’est-à-dire qu’elles n’auraient été reportées dans le séquençage officiel, qui prend en compte uniquement le nucléotide le plus fréquent dans chaque position pour chaque patient. Ces mutations auraient donc été complètement ignorées, alors qu’elles représentent un nombre non négligeable d’évènements (2.865 apparitions chez ces patients). Pire, même celles qui étaient majoritaires chez au moins une personne auraient été ignorées dans la majorité de cas (1.553 cas contre 1.143 cas où elles auraient été prises en compte, car majoritaires chez un patient). Au total, 4.418 évènements de mutation alternative auraient été invisibilisés chez ces personnes, en prenant en compte uniquement celles présentes chez au moins dix patients. Ces résultats ont été confirmés avec 110 séquençages retrouvés dans les bases de données internationales, où 36% de mutations alternatives sont invisibles si on regarde uniquement les séquences majoritaires chez chacune de ces personnes.

Ces séquences invisibles pourraient cacher le prochain variant dominant
Le problème d’ignorer une grande partie des mutations minoritaires est qu’elles risquent de devenir majoritaires. C’est ce qui est arrivé avec le variant Delta, selon les résultats de cette étude. Pendant la période dominée par le variant Alpha, le variant Delta était déjà détectable chez une partie des patients, des mois avant que ce variant ne prenne le dessus. Si on avait pris en compte ces séquences minoritaires, on aurait été moins pris au dépourvu par Delta, qui a entrainé une grande mortalité dans le monde entier. « Ces variants génétiques observés à basse fréquence chez les personnes infectées peuvent être des indicateurs précoces de nouvelles souches qui pourraient devenir responsables des prochaines vagues épidémiques », résume Ernest Chan, directeur de bio-informatique à l’Institut de Biologie computationnelle de Cleveland de l’École de médecine de Case Western, dans un communiqué.

Le nombre de séquences minoritaires augmente avec le temps
Or, plus la pandémie avance, plus il pourrait être important de garder une vigilance sur de nouveaux variants. Car, plus le temps passe, plus le virus a le temps d’infecter davantage de personnes et d’évoluer, sachant que chaque personne infectée porte en elle entre un et cent milliards de virions durant le pic de l’infection, lui donnant de grandes possibilités d’évolution. Ainsi, le nombre moyen de séquences alternatives par personne a doublé entre avril 2020 et aout 2021.

Pas de différence chez les personnes immunodéprimées
Une partie des patients de cette étude étaient immunodéprimés, ce qui en théorie pourrait permettre plus de liberté d’évolution au virus. Pourtant, les chercheurs n’ont pas observé davantage de séquences alternatives chez ces personnes. Cependant, l’étude n’a pas fait un suivi à long terme des participants, donc il est possible que ces patients accumulent plus de mutations du virus à cause d’infections plus longues.

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