Plus fréquentes avec l’âge et extrêmement douloureuses, les crampes nocturnes peuvent devenir invalidantes si elles deviennent récurrentes. Le docteur Emmeline Lagrange, neurologue au CHU de Grenoble, nous en explique le fonctionnement et nous apporte des solutions.
Une crampe, c’est quoi au juste ?
La crampe musculaire correspond à une contraction soudaine et involontaire d’un ou plusieurs muscles. Généralement elle se produit sur la cuisse, le mollet ou la cheville.
« En temps normal, dès que nous faisons un mouvement, le muscle se contracte puis se raccourcit, il doit se relâcher pour pouvoir refournir un autre effort et ainsi de suite », décrit le docteur Emmeline Lagrange.
La contraction musculaire est donc un processus d’excitation-contraction qui doit être suivie d’un relâchement. « La cellule nerveuse pour amener l’information de la contraction au muscle va activer des entrées du sodium et faire ressortir du potassium, poursuit la spécialiste.
La fibre musculaire va se contracter, faire rentrer du calcium dans ses cellules puis pour se relâcher va libérer ce calcium ».
Mais en cas de crampe, c’est comme si le muscle perdait son savoir-faire à se relâcher. Et c’est à ce moment précis que la douleur arrive. Le processus est le même pour la crampe nocturne. La nuit, pendant notre sommeil, nous bougeons dans notre lit de manière innée pour pouvoir éviter d’être ankylosé.
Dans ces petits mouvements constants, les muscles des jambes se contractent et se relâchent sans cesse. Mais il arrive aussi qu’ils oublient de se relâcher comme en journée.
Quelles sont les causes des crampes nocturnes ?
Les crampes musculaires surviennent généralement chez des personnes en bonne santé. Dans de très rares cas, elles peuvent constituer des symptômes de troubles neurologiques.
Un mauvais entraînement
La crampe musculaire nocturne se produit essentiellement après avoir fait un effort musculaire intense dans la journée sans avoir pris le temps de s’échauffer ou d’étirer le muscle. Elle peut aussi apparaître chez les personnes qui se remettent au sport après une longue période d’abstinence.
L’effort amène une inflammation bénéfique, fait perdre de l’eau et des minéraux. Ne pas se réhydrater favorise la crampe musculaire car les minéraux perdus ne permettent plus l’équilibre physiologique du muscle. « Le muscle nettoie mal les “déchets inflammatoires” liés à son activité », précise l’expert.
Une mauvaise hydratation
N’oubliez pas de boire régulièrement de l’eau dans la journée mais aussi après un effort physique. « Pour des efforts de moins de 3h ou non violents, inutile d’acheter de boissons commerciales, dites énergisantes », conseille la spécialiste.
L’insuffisance veineuse
La mauvaise circulation veineuse est une source de crampes musculaires, car elle ne permet pas aux vaisseaux sanguins d’apporter au sein du muscle suffisamment d’oxygène pendant l’effort.
« Le risque est ainsi de fabriquer des lactates, craint le médecin, sans arriver à les drainer, et cette perte d’équilibre va contribuer à la crampe. Pour équilibrer la production et l’élimination des lactates, il faut réaliser des efforts progressifs s’hydrater et respirer tout au long de l’effort ! ».
Une maladie endocrinienne
Plus rarement, d’autres causes peuvent être à l’origine des crampes musculaires nocturnes comme les maladies endocriniennes tels le diabète ou l’hypothyroïdie. « L’hypothyroïdie donne très facilement des maladies du muscle, constate le médecin. Il est défaillant et n’arrive plus à se relâcher facilement. La crampe est un symptôme dans ce cas ».
Les carences en magnésium
Elles peuvent également marquer l’apparition de crampes au mollet. Le magnésium et le calcium permettent en effet à la fibre du muscle de se relâcher.
Les carences vitaminiques du groupe B qui aident au bon fonctionnement de l’excitation du muscle par le nerf, jouent aussi un grand rôle dans l’apparition des crampes nocturnes. « La vitamine B équilibre la fibre nerveuse qui pourrait donner des informations en excès si elle était défectueuse et déclencher des crampes par exemple ».
Des médicaments
Lisez en détails les effets indésirables précisés sur les notices de vos médicaments car ces derniers peuvent aussi générer des crampes. Notamment ceux qui facilitent les fuites en potassium (diurétique, médicament contre la tension artérielle).
« Il ne s’agit pas d’interrompre son traitement en cas de crampes, met en garde Emmeline Lagrange, mais de faire un point avec son médecin afin de voir comment atténuer les crampes. Peut-être après un dosage du potassium dans le sang une substitution sera mise en place. Il en est de même pour les médicaments contre le cholestérol qui peuvent chez certaines personnes amener de l’inflammation au sein du muscle ».
L’excès de boissons énergisantes
Il est commun de voir aussi des crampes nocturnes chez les adolescents qui abusent des boissons énergisantes. Ces boissons ultra riches en sucre et caféine peuvent provoquer des crampes et notamment la nuit.
Comment faire passer les crampes nocturnes ?
En cas de crampe nocturne, massez le muscle en profondeur pour l’étirer et le remettre dans sa position de décontraction. « N’appliquez jamais du froid sur une crampe mais plutôt du chaud (action du massage, bouillote), conseille notre expert. Vous aiderez ainsi le muscle à aller dans l’apaisement ».
Vous pouvez aussi appliquer un gel chauffant de pré-effort (Akileine) habituellement utilisé par les sportifs pour favoriser l’échauffement.
Prévenir les crampes nocturnes
En prévention, évitez de porter des talons trop hauts, trop longtemps, surtout si vous devez rester debout car vous obligez votre mollet à rester trop longtemps en extension plusieurs heures d’affilée. Arrivé le soir, c’est la crampe assurée.
Il est essentiel de faire des étirements après une activité physique intense ou après une remise à niveau, afin d’aider le muscle à se relâcher, et surtout de ne jamais interrompre un effort brutalement.
Pour améliorer la circulation sanguine après l’effort, une douche froide des jambes est recommandée en prévention (c’est l’inverse une fois que la crampe est installée). Et n’oubliez pas de boire afin d’éliminer les toxines.
Quand consulter en cas de crampes nocturnes ?
Si les crampes musculaires persistent et perturbent régulièrement votre sommeil, parlez-en à votre médecin généraliste qui vous prescrira une cure de magnésium (pour un adulte 100 mg par jour sur 3 mois en prévention et 200 mg par jour sur 2 mois en traitement d’attaque) et vérifiera le fonctionnement de votre thyroïde (dosage sanguin de la TSH Thyréostimuline).
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