Depuis le mois de mars dernier, le ministère de la Santé et de l’Action sociale a lancé le Dossier Patient Unique à Dakar. L’hôpital Abass Ndao a été choisi pour abriter la phase pilote du projet qui a démarré au sein de la facturation, en médecine interne et au service cardiologie. Seulement, le projet qui doit être généralisé dans les structures de santé, commence à faire parler de lui.
Des agents relèvent des failles qui touchent une non-maîtrise de l’outil. D’ailleurs, avec la disparition des autres logiciels disponibles dans les structures sanitaires depuis plusieurs années, l’inquiétude d’une perte de données est de mise chez les acteurs du système.
Le Dossier Patient Unique peine à être une réalité dans le pays, même au niveau de structures abritant cette digitalisation.
Au sein de l’hôpital Abass Ndao de Dakar, des médecins sont toujours à l’ère analogique. Les consultations se font sans passer par la digitalisation ou maintiennent d’anciens logiciels. Une situation due souvent à une non-maîtrise de l’outil mais aussi au manque d’informations concernant ledit dossier.
D’autres problèmes sont aussi relevés par des agents de soins à savoir des lenteurs dans l’utilisation de la nouvelle plateforme qui sera démultipliée sur toute l’étendue du territoire national.
Au niveau du ministère de la Santé et de l’Action sociale, la Direction de la Digitalisation est formelle, l’orientation du ministère actuelle est un Dossier Patient Unique parce qu’il leur faut une base de données unique.
Seulement, dans cette quête, des acteurs de la santé ont déclaré : «nous avons un nouveau logiciel. Il nous est demandé par la tutelle de l’utiliser pour l’enregistrement de nos patients. Ce qui se pose comme difficultés, si le patient est nouveau, le problème ne se pose pas. On lui ouvre un Dossier Patient Unique qui pourra l’accompagner dans ses soins.
Par contre, si le malade est suivi dans la structure et enregistré régulièrement, il nous faut toujours nous référer à l’ancien logiciel pour avoir les données de son suivi».
Dans d’autres structures où la digitalisation du Dossier Patient Unique est très avancée depuis plusieurs années, des médecins restent sceptiques quant à la réussite d’un tel projet à court termes. En attendant que la phase test fasse ses preuves, dans les grands hôpitaux de Dakar, d’autres logiciels continuent de servir tant dans la facturation que dans le suivi du malade.
Une démarche qui n’est pas rentable pour le ministère de la Santé et de l’Action sociale.
«Aujourd’hui, si moi, patient, je me retrouve sur cinq bases de données, nous ne pourrons pas atteindre l’objectif recherché qui est de faciliter les soins. Avec ce nouveau système de Dossier Patient Unique, à chaque fois que je vais en consultation chez un médecin, on met à jour cette base», a déclaré le coordonnateur de la Cellule de la Carte sanitaire et sociale, de la Santé digitale et de l’Observatoire de Santé (CSSDOS), Dr Ibrahima Khalilou Dia
. Et de poursuivre : «nous sommes dans la phase test. Avec le concours des agents dudit logiciel, nous pourront parfaire le système si besoin en est, car c’est possible que des difficultés soient notées dans la mise en œuvre».
DISPARITIONS DES AUTRES LOGICIELS ET PROBABLE PERTE DE DONNEES
Dans la gestion hospitalière, le suivi du Dossier Patient Unique reste le chantier le plus avancé. Au moins, deux tiers (2/3) des établissements de santé disposent d’un logiciel qui leur permet de suivre le malade, de gérer les données médicales ainsi que dans le partage des données du patient entre praticiens.
De telles pratiques facilitent aussi la prise en charge des malades entre praticiens qui se partageaient le dossier.
Cependant, force est de reconnaitre que cette action reste bénéfique pour la structure qui en abrite. Il ne l’est pas dans la mesure où le dossier n’est pas transportable, du fait qu’un médecin d’une autre structure sanitaire ne pourra pas disposer de ce dossier, à moins qu’il n’en émette la demande auprès de l’établissement sanitaire détenteur.
Certes, ce nouveau projet de dossier patient unique demeure une opportunité pour les praticiens et le malade dans la gestion de son carnet de santé et le suivi des soins.
Cependant, comme le prétend Dr Dia, «pour l’instant, l’orientation est unique. Le mot unique veut dire que si on veut que les choses marchent, il faut démarrer avec un seul système mis en place par le ministère de la Santé et au fur et à mesure on verra ce qu’il faut faire.
On a un système acquis qui est bon et qui est de qualité», le Sénégal tend vers un seul et unique système.
Dans cette réorganisation, avec le nouveau système, un risque de perte de données pourrait survenir et réduire les acquis de plusieurs années de collectes à néant, à moins que ces données soient versées dans ledit logiciel. Les anciens gestionnaires seront-ils généreux pour en faire don au nouveau ?
Une autre équation qui risque encore de plomber cette nouvelle disposition qui a commencé à subir les affres de la concurrence.
sudquotidien