En ce mois où est célébrée l’histoire des noirs, WaruStudio met à l’honneur des figures de l’abolitionnisme et de la lutte pour les droits civiques des noirs américains. L’exposition «Changer le monde» est un dialogue entre l’artiste sénégalaise Fatou Kandé Senghor et l’Ivoirien Aubin Temilayi Houehanou, autour de ces femmes qui ont marqué l’histoire.

L’histoire a retenu le geste épique de Rosa Parks. Mais 100 ans avant, il y a eu Frances Ellen Watkins Harper (1825- 1911). En 1858, elle refuse d’abandonner son siège et d’aller s’asseoir dans la section réservée aux noirs d’un trolley de Philadelphie. Auteur de la première nouvelle publiée par une afro-américaine en 1859, The two offers, Frances Ellen Watkins Harper fut aussi une fervente partisane de l’abolition, de la prohibition et du droit de vote des femmes.

Son portrait ainsi que celui de treize autres figures de la lutte pour l’abolition et les droits civiques des noirs aux Etats-Unis ornent les murs de la Galerie Waru­Studio à Mermoz. A quelques jours de mars où les femmes sont célébrées et en ce mois de février où l’histoire des noirs est célébrée, deux artistes, la Sénégalaise Fatou Kandé Senghor et l’Ivoirien Aubin Temilayi Houehanou, ont choisi de dialoguer autour de ces figures de femmes.

L’expo­sition «Changer le monde» est à la fois un travail de mémoire, de conscientisation et de rappel que les deux artistes livrent avec, chacun, sa propre démarche artistique.

Si Aubin Temilayi Houehanou propose des portraits de ces femmes sur toile, Fatou Kandé Senghor propose un traitement sur un autre support, leur conférant une dimension pop art. «Ces 14 femmes pionnières, qui ont participé à la lutte pour l’abolition, sont représentées en portrait par Aubin Temilayi Houehanou qui a réalisé ces toiles pendant une résidence à WaruStudio. Comme on a fait ensemble cette résidence, je repars sur ces portraits et je les fais entrer dans une dimension pop art, sur des sortes de tableaux aux couleurs du drapeau américain», raconte l’artiste pluridisciplinaire Fatou Kandé Senghor. Entre les deux artistes, le dialogue est fécond. «Il est peintre et moi non.

Pour cette exposition, je pars de sa peinture à lui pour entrer en conversation.

C’est lui qui mène la danse et je suis. C’est harmonieux, notre collaboration est réussie. Il grandit, il reçoit, je partage, je transmets, que demander de mieux», confie Mme Senghor. Le traitement de l’œuvre du jeune artiste ivoirien par Fatou Kandé Senghor, fait revivre des souvenirs d’enfance chez cette dernière. Des souvenirs de ces tissus wax sur lesquels étaient imprimés des figures féminines iconiques, des hommes politiques, des religieux, des chefs d’Etat et des dignitaires étrangers lors de leurs visites officielles.

Parfois même, c’étaient des stars de la musique, des personnalités culturelles ou sportives. Une façon de fixer dans la mémoire collective, les visages de ces femmes noires américaines, qui ont ouvert la voie d’une lutte qui se perpétue encore aujourd’hui sous d’autres formes et par d’autres femmes.

C’est sans doute la raison pour laquelle l’exposition est dédiée à «la grande sœur» Bineta Sarr, une hydraulicienne de formation, présidente de l’Association pour la promotion de la femme sénégalaise (Aprofes).

«Elle a mené les femmes de sa région sur le chemin de la dignité et les a encadrées afin qu’elles retroussent leurs manches et se battent pour leur autonomie financière», témoigne Fatou Kandé sur cette femme aujourd’hui disparue. Le mois prochain, l’hommage aux femmes se poursuivra dans la galerie Waru.

«En mars, on inonde le même espace avec des portraits de femmes noires iconiques dans le monde sur toutes sortes de supports accessibles afin qu’elles se retrouvent dans les rues et les maisons après achat. Même exposition, même thème, mais avec une avalanche d’artisanat d’art conscient», révèle Fatou Kandé Senghor.

Hommage à Bineta Sarr
Les femmes représentées dans cette galerie de portraits, sont autrices, scientifiques, chercheuses, artistes, militantes… «Des femmes qui entreprennent des actions nouvelles et justes, des pionnières engagées qui deviennent d’illustres figures», notent les artistes. Elles portent des noms bien connues comme Harriet Tubman née dans l’esclavage en 1822 dans le Maryland. Figure majeure du marronnage, de l’abolitionnisme et du droit des femmes aux Etats-Unis, Harriet Tubman est cette dame dont la vie a été portée à l’écran pour son rôle dans cette chaîne de solidarité qui conduisait les esclaves vers la liberté, l’underground railroad, le chemin de fer clandestin.

Elle participe activement à ce mouvement abolitionniste radical qui, à travers un système de routes et haltes clandestines, organisait la fuite des esclaves vers la liberté.

Le 10 mars de chaque année, est célébré le Harriet Tubman Day, une occasion d’étudier et de réfléchir à la portée de son action pour l’abolition de l’esclavage. D’autres figures de la lutte des noirs sont représentées comme Bethany Veney, née esclave avant la guerre civile qui publie The narrative of Bethany Veney, une femme esclave. Charlotte Forten Glimke (1837- 1914), auteure, poète et éducatrice abolitionniste qui enseignait à des esclaves affranchis pendant la guerre de Sécession, figure également sur cette liste.

«Ses journaux intimes, écrits avant la fin de la guerre de Sécession en Caroline du sud, sont publiés et constituent un document rare sur la vie des femmes noires libres dans le nord, avant la guerre civile», notent à son sujet, les artistes. Elle est aussi la première afro-américaine embauchée pour enseigner à des étudiants blancs.

lequotidien

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