L’insuffisance rénale demeure un enjeu majeur de santé publique à Touba. Ce qui est particulièrement préoccupant ces dernières années, c’est que cette maladie touche de plus en plus de jeunes. Cette observation a été faite par le Dr Amadou Samba Sow, chef de service de néphrologie à l’établissement public de santé de Ndamatou lors d’un entretien avec le quotidien national le Soleil.
À l’hôpital de Ndamatou, l’unité de dialyse prend régulièrement en charge environ 36 patients. En plus de ces patients officiellement recrutés, le chef de service de néphrologie souligne qu’il existe également d’autres malades souffrant de problèmes aigus, que le centre doit parfois accueillir en urgence.
En conséquence, le nombre moyen de patients dialysés dans ce centre atteint environ 50.
Ces résultats suggèrent, selon lui, que la situation de la maladie à Touba est préoccupante. Bien qu’il n’existe pas d’études de terrain basées sur des outils précis, le Dr Sow énumère plusieurs indices qui lui permettent d’évaluer la situation. Il précise également qu’ils consultent deux fois par semaine.
En effet, parmi dix patients consultés, deux ou trois se trouvent dans un stade terminal qui nécessite des séances de dialyse.
Ainsi, chaque mois, entre 15 et 20 nouveaux patients débutent un traitement par dialyse. Pour lui, c’est un chiffre considérable.
De plus, il a souligné que certains malades ne se rendent pas à l’hôpital.
Selon lui, cela démontre l’ampleur considérable de la situation, qui ne cesse d’augmenter. Cette réalité contribue à l’explosion des listes d’attente, notamment celle de l’unité de Ndamatou, qui compte actuellement entre 130 et 150 patients.
Parmi les patients traités, le Dr Sow a souligné que la grande majorité sont des femmes.
Toutefois, un constat alarmant a été observé ces dernières années à Touba : la maladie rénale touche de plus en plus de jeunes. « Nous remarquons qu’un plus grand nombre de jeunes tombent malades que de personnes âgées », a-t-il expliqué. Pour lui, c’est une situation très préoccupante pour une société en quête de développement.
« Si des jeunes commencent à souffrir de maladies chroniques, particulièrement d’insuffisance rénale, leur capacité à contribuer à la société se voit compromise. En plus des conséquences physiques que cela peut entraîner sur leur organisme », explique-t-il.
Dans cette optique, il souligne avoir remarqué, lors des consultations, que ces jeunes arrivent généralement dans un état d’hypertension avancé.
Cela signifie qu’ils se présentent souvent à un stade terminal, rendant l’exploration des causes de leur maladie particulièrement complexe, surtout en raison des limitations techniques à Touba. Par conséquent, il leur est difficile de déterminer précisément les raisons pour lesquelles ces jeunes développent des maladies rénales.
Cependant, il souhaite souligner que l’hypertension artérielle et l’insuffisance rénale sont étroitement liées.
Il a expliqué : « Une hypertension artérielle sévère, si elle n’est pas correctement suivie, peut mener à une insuffisance rénale. De plus, lorsque l’on souffre d’une insuffisance rénale, il est également possible de développer une hypertension artérielle. » Il a ajouté qu’à un stade avancé de la maladie, il devient difficile de dissocier les deux conditions.
En ce sens, notre interlocuteur souligne l’existence de facteurs qui contribuent à la prévalence de maladies dans la ville sainte de Touba.
Il met en avant les personnes à risque, en particulier celles atteintes de pathologies chroniques qui ne bénéficient pas d’un suivi médical adéquat.
Parmi ces cas, il mentionne spécifiquement les patients souffrant de diabète et d’hypertension. Selon lui, l’absence de suivi médical peut conduire inéluctablement à des complications graves, notamment à l’insuffisance rénale.
Les médicaments, l’une des causes de l’insuffisance rénale
De plus, il a également évoqué les comportements inappropriés observés au sein des populations. Selon ses propos, un grand nombre de patients se tournent vers des traitements traditionnels ou des médicaments non réglementés. Il affirme que ces derniers sont extrêmement nocifs pour les reins. «
De nombreux cas d’insuffisance rénale chronique que nous rencontrons peuvent être attribués à des problèmes liés à ces médicaments », a-t-il déclaré, tout en précisant qu’à Touba, de nombreuses personnes recourent à la phytothérapie.
De plus, il a souligné que l’alimentation des personnes à risque n’est pas toujours équilibrée.
« Nous consommons souvent des aliments trop salés, notamment des bouillons dont nous ne connaissons pas la composition, ce qui peut aggraver des maladies chroniques telles que l’hypertension artérielle », a-t-il expliqué. Par ailleurs, il met également en avant les infections, comme le paludisme, qui peuvent fréquemment entraîner des complications rénales.
Dans cet esprit, il encourage les autorités et les populations à mettre l’accent sur la prévention.
À cet égard, il rappelle à chacun d’éviter toutes les causes pouvant entraîner une insuffisance rénale. Cela passe, à l’en croire, par une alimentation équilibrée, la pratique d’exercices physiques pour les personnes à risque, mais surtout par un suivi médical régulier et l’évitement de tout médicament toxique, qu’il soit traditionnel ou présumé inoffensif.
De plus, il souligne l’importance pour les personnes souffrant d’hypertension artérielle ou de diabète de consulter régulièrement les établissements de santé, afin de bénéficier de traitements adaptés. Selon lui, le respect de ces mesures préventives est essentiel pour protéger les reins, notamment chez ceux qui n’ont pas encore développé d’insuffisance rénale.
Il a également souligné l’importance du dépistage précoce, qui, selon lui, représente pleinement le thème de la Journée mondiale du rein cette année : « Comment vont vos reins? Un dépistage précoce pour la santé de vos reins ». Il insiste sur le fait qu’il est essentiel de consulter un professionnel de santé même lorsque l’on ne se sent pas malade, car, comme il l’affirme, « c’est un test très simple ».
Pour les personnes issues de familles touchées par des maladies rénales chroniques, il est conseillé de consulter un néphrologue tous les trimestres. Cela leur permettra d’effectuer un bilan régulier, d’ajuster leur traitement et de mieux protéger leurs reins.
Concernant l’État, il lui recommande de rendre cette prévention plus accessible en garantissant la formation continue des agents de santé.
En effet, il souligne que « beaucoup de patients ne reçoivent pas une prise en charge adéquate de la part de nos collègues, ce qui n’est pas sans rappeler les traitements issus de la médecine traditionnelle, que l’on critique actuellement ».
C’est pourquoi il insiste sur la nécessité pour l’État d’encourager cette formation au sein des structures sanitaires, qu’il considère comme le seul moyen efficace de prévenir les maladies.
Le service de néphrologie de Ndamatou se compose de deux unités, dont la principale est celle dédiée à la dialyse.
Ce centre de dialyse se trouve au sein d’une clinique privée et dispose de 17 machines, dont 14 sont opérationnelles. Parmi celles-ci, 12 machines sont utilisées pour les séances chroniques, tandis que les deux restantes sont réservées aux patients souffrant de maladies aiguës.
Au centre de dialyse, le Dr Sow souligne que les conditions de travail sont particulièrement ardues.
Étant situé en dehors de la structure sanitaire de Ndamatou, il devient parfois compliqué de gérer certaines urgences. « Il nous manque des bonbonnes d’oxygène, et il arrive que l’ambulance mette du temps à arriver », déclare-t-il avec frustration. Il convient également de souligner qu’il y a une pénurie de personnel.
Cette situation limite leur capacité à accueillir un nombre suffisant de patients.
En effet, le bon fonctionnement de toutes les machines nécessite un effectif adéquat d’agents de santé. « Nous avons vraiment besoin de personnel de soutien et de techniciens en dialyse pour pouvoir prendre en charge un plus grand nombre de malades. », conclut-il.
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