Deux essais cliniques récents suggèrent que la croyance populaire qui consiste à dire que la supplémentation en vitamine D protège des fractures et allonge l’espérance de vie, prenant racine dans les mécanismes biochimiques au sein desquelles la vitamine D intervient, n’est pas cliniquement fondée.
Le marché des compléments alimentaires tente de répondre à un besoin de notre époque : les gens veulent prendre soin de leur santé, même s’ils vont bien. Ils souhaitent maximiser leur bien-être, diminuer leur risque de maladie, s’émanciper parfois de l’autorité médicale, tant de raisons qui font que les compléments alimentaires sont une solution technique attrayante.
En effet, la connaissance médicale est toujours située : elle ne se prononce généralement que pour un groupe de patients précis (le problème de la validité externe des essais cliniques que les essais multicentriques tentent de résoudre) et pour des critères de jugements particuliers (une pathologie, un marqueur, un symptôme, etc.). Pas de solution miracle pour les nouveaux objectifs santé d’une partie de la population.
Le marché des compléments alimentaires s’encombre rarement de ces considérations.
Des raisonnements mécanistes, basés sur les connaissances biochimiques de notre organisme ou des essais cliniques isolés, manquant de puissance statistique lui suffisent. En effet, grâce à cela
, les vendeurs de compléments peuvent attester d’une pseudo-efficacité en utilisant un langage scientifique complexe ou bien en suggérant que l’efficacité est cliniquement démontrée par des essais peu robustes qu’ils ont eux-mêmes financés la plupart du temps. Dès lors, on se retrouve au sein d’une cacophonie, avec des produits qui se vantent de booster votre immunité, de réduire au silence vos troubles digestifs ou de vous faire perdre du poids. C’est un peu le cas de la vitamine D dont on vante les mérites sur l’immunité, les fractures, la mortalité, etc. Deux essais cliniques viennent directement challenger ces croyances répandues.
Des essais cliniques robustes
Ces deux essais ont duré longtemps : cinq ans pour le premier, cinq ans et trois mois pour le second.
Le premier est un essai randomisé en double aveugle contre placebo et tente d’évaluer l’effet de la prise de 60.000 UI de vitamine D par mois sur la mortalité chez des Australiens de plus de 60 ans, non dépistés pour une carence en vitamine D. Résultat, la prise de vitamine D n’a eu aucun effet significatif en matière de mortalité.
La vitamine D ne semble pas avoir d’effet sur le risque de fractures chez les personnes âgées de plus de 60 ans.
Le second est un essai auxiliaire randomisé (avec une randomisation factorielle) en triple aveugle contre placebo. L’essai principal (VITAL) avait pour objectif de déterminer l’effet d’une prise d’oméga
3 d’un côté et de vitamine D de l’autre sur la prévention des maladies cardiovasculaires et du cancer.
L’essai auxiliaire dont il est question s’est concentrée sur le risque de fracture autodéclarée comme critère de jugement. Chez plus de 25.000 patients américains non dépistés pour une carence en vitamine D, le risque de fracture n’a pas été réduit par la prise de vitamine D.
Que faut-il en conclure ?
La prise de vitamine D ne semble pas avoir d’effet sur la mortalité, ni sur le risque de fracture chez les personnes de plus de 60 ans sans diagnostic de carence. Il convient alors d’être prudent avec la prise de compléments alimentaires dépourvus de certains bénéfices, car les risques peuvent parfois être mal évalués, comme le suggère la récente enquête ouverte sur le curcuma. Évidemment, ces essais ne disent rien sur l’efficacité de la vitamine D dans d’autres indications et chez d’autres types de patients.
futura
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