Dans une récente entrevue accordée à un média international, le ministre Ismaela Madior Fall a soulevé une vive controverse en s’exprimant sur la compétence du Conseil constitutionnel sénégalais en matière de traitement des lois constitutionnelles. Ses déclarations ont suscité de vives réactions, notamment de la part de Thierno Bocoum, ancien parlementaire et président du mouvement AGIR.
Le ministre a affirmé que le Conseil constitutionnel n’était compétent que pour connaître des lois organiques et ordinaires, mais pas des lois constitutionnelles. Il a soutenu que le pouvoir constituant est souverain et qu’une loi constitutionnelle ne peut être contrôlée, encore moins censurée, par la juridiction constitutionnelle.
Cependant, Thierno Bocoum souligne que les dispositions constitutionnelles sénégalaises, notamment les articles 74 et 92 de la constitution ainsi que l’article premier de la loi organique 2016-23 relative au conseil constitutionnel, ne précisent pas cette distinction entre les types de lois.
Il estime que le Conseil constitutionnel est compétent pour se prononcer sur la constitutionnalité des lois, y compris les lois constitutionnelles.
La principale controverse réside dans la proposition de loi visant à rallonger la durée du mandat présidentiel.
Selon Bocoum, cette proposition viole manifestement l’article 27 de la constitution, qui limite la durée du mandat présidentiel à cinq ans. Il affirme que le Conseil constitutionnel est compétent pour contrôler une loi constitutionnelle, surtout lorsqu’elle risque de violer une disposition intangible de la constitution.
Par ailleurs, Bocoum critique également le manque de conformité de cette proposition de loi avec les règles de recevabilité parlementaire, telles que définies dans l’article 60 du règlement intérieur de l’Assemblée nationale. Il souligne que le report de l’élection présidentielle entraînerait des charges publiques supplémentaires sans proposition de recettes compensatrices, ce qui contrevient aux règles parlementaires.
Enfin, Bocoum condamne fermement les affirmations du ministre Ismaela Madior Fall selon lesquelles l’Assemblée nationale aurait accusé des juges constitutionnels de corruption. Il rappelle que l’Assemblée nationale a plutôt mis en place une commission d’enquête parlementaire pour clarifier cette affaire, impliquant le groupe parlementaire du PDS et les juges constitutionnels.
Les déclarations du ministre Ismaela Madior Fall ont suscité une controverse majeure quant à la compétence du Conseil constitutionnel sénégalais et à la conformité des lois en cours d’examen. Les positions divergentes entre le gouvernement et les acteurs politiques soulignent l’importance cruciale de la séparation des pouvoirs et de la primauté du droit dans le système démocratique sénégalais.
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