La décision du président de la République de faire voter loi d’amnistie se rapportant aux manifestations politiques entre 2021 et 2023 suscite beaucoup de polémiques. Des Sénégalais se demandent d’ailleurs si une loi d’amnistie peut-être abrogée ?
Senego a sollicité les éclairages du Professeur Babacar Niang, agrégé de droit privé et avocat au barreau de Paris sur la question. Il explique que l’abrogation est admise dans certains cas.
Le professeur d’Université rappelle d’emblée que le principe de la non-rétroactivité de la loi pénale de fond sévère « s’opposerait à ce qu’une loi nouvelle abroge rétroactivement une loi d’amnistie ». Ce principe est constitutionnel. Toutefois, il affirme « qu’il est admis en jurisprudence le fait d’écarter une loi d’amnistie pour atteindre des objectifs de répression d’auteurs de crimes contre l’humanité, voire d’atteintes aux droits humains ( affaire Pinoche, Ould Dah, etc). »
M. Niang de déclarer qu’une loi d’amnistie ne doit pas avoir pour objet de garantir une impunité d’atrocités.
« J’ai vu dans la presse ou dans les réseaux sociaux certains évoquer des cas d’abrogation de loi d’amnistie dans des pays d’Amérique latine. Est-ce qu’il s’agit de modèles anthologiques de démocratie ? Cela étant, l’abrogation est éventuellement justifiable si on considère en théorie qu’une loi injuste n’est pas une loi valide », a-t-il ajouté.
L’agrégé de droit privé estime que la raison qui délimite la sphère de la liberté s’oppose à l’amnistie des faits graves.
« Une loi injuste est celle contraire à la raison puisqu’en droit pénal, la loi s’incorpore et s’identifie à la raison. Seule la raison peut délimiter la sphère de la liberté. La raison ne peut permettre de garantir l’impunité de faits graves », a-t-il expliqué.
senego