La mesure de la rigidité artérielle pourrait être un bon outil de prédiction du risque cardiovasculaire et permettrait de détecter les personnes les plus susceptibles de développer les pathologies du cœur, principale cause de décès dans le monde. C’est ce que suggère une étude qui préconise d’utiliser l’indice Cavi pour évaluer la perte de souplesse des artères.

Les maladies cardiovasculaires représentent la principale cause de décès dans le monde. Prévenir ce qu’on appelle le risque cardiovasculaire en identifiant les personnes qui y sont le plus susceptibles est un enjeu majeur de santé publique.

Dans une nouvelle étude, dont les résultats viennent d’être publiés dans la revue eBioMedicine, des chercheurs et des chercheuses de l’Inserm, de l’université de Lorraine et du CHRU de Nancy se sont intéressés à ce sujet, en se penchant plus spécifiquement sur la rigidité artérielle et son évolution avec l’âge, le vieillissement étant associé à une perte de souplesse des artères.

Grâce aux données de santé collectées auprès de plus de 1 250 Européens, leurs travaux confirment que plus la rigidité artérielle est élevée, plus le risque cardiovasculaire est augmenté.

Les scientifiques suggèrent d’utiliser la mesure de la rigidité artérielle comme outil de prédiction du risque cardiovasculaire du patient et soulignent l’intérêt du recours en clinique à un outil spécifique appelé Cavi (Cardio Ankle Vascular Index ou Indice vasculaire cardio/cheville).

Contrôler la souplesse des artères
Le risque cardiovasculaire est la probabilité de survenue d’une maladie ou d’un accident cardiovasculaire (maladies du cœur et des artères). Trouver une mesure qui permette de prédire ce risque en détectant au plus tôt les facteurs qui peuvent l’influencer est un enjeu de taille pour la recherche.

Les facteurs de risque déjà bien connus sont l’hypertension artérielle, le tabagisme, le diabète, l’hypercholestérolémie, le surpoids ou la sédentarité.

De précédentes études ont montré que le vieillissement a un effet sur la souplesse de nos artères : celles-ci deviennent de plus en plus rigides à mesure que nous vieillissons. D’autre part, la littérature scientifique indique que cette perte de souplesse peut être accélérée par d’autres facteurs durant le vieillissement (par exemple l’hypertension ou le diabète), et qu’elle est associée à un risque cardiovasculaire accru.

En se fondant sur ces éléments, il avait été suggéré que s’intéresser à la rigidité artérielle pouvait présenter un intérêt pour prévenir le risque cardiovasculaire.

Toutefois, l’examen de la rigidité artérielle ne figure pas parmi la liste des pratiques recommandées en clinique.

Dans cette nouvelle étude, les scientifiques se sont intéressés à un outil de mesure de la rigidité artérielle appelé Cavi (Cardio Ankle Vascular Index ou Indice vasculaire cardio/cheville), avec l’hypothèse que son utilisation en clinique pourrait permettre de prédire le risque cardiovasculaire des patients.

Ils se sont spécifiquement intéressés à Cavi en raison de sa précision dans les mesures, du fait qu’il ne soit pas influencé par la pression artérielle mais le reflet de la structure même de l’artère, ainsi que par son caractère non invasif.

Non invasif, l’indice Cavi reflète la structure de l’artère
En effet, l’indice Cavi est mesuré par le biais de deux brassards disposés autour de chaque bras ainsi que de deux autres au niveau des chevilles, évaluant ainsi la rigidité de l’artère fémorale à l’artère tibiale. Un microphone est par ailleurs disposé au niveau du cœur.

L’outil mesure ainsi la vitesse de circulation du sang et calcule un indice chiffré : plus le numéro est élevé, plus la rigidité des artères est forte — un indice de 10 est déjà signe d’une grande rigidité.

Au cours de leurs travaux, les chercheurs ont suivi 1 250 personnes originaires de 18 pays européens toutes âgées de plus de 40 ans*.

Celles-ci ont renseigné leurs antécédents médicaux et ont passé un examen physique incluant une évaluation de leur rigidité artérielle grâce à l’outil de mesure Cavi. Elles ont ensuite été convoquées pour un examen de suivi deux ans après, et pour certaines, jusque 5 ans après la première mesure.

L’objectif du suivi était d’évaluer la progression de la rigidité artérielle et de corréler cette évolution avec l’état de santé général des participants.

“Chaque augmentation d’un point de l’indice Cavi […] était associée à un risque accru de 25 % de survenue d’un événement cardiovasculaire dans les années qui suivaient la mesure”

Grâce à leurs mesures, les chercheurs ont pu observer que chaque augmentation d’un point de l’indice Cavi, qui correspond à une augmentation d’environ 10 % de la rigidité artérielle, était associée à un risque accru de 25 % de survenue d’un événement cardiovasculaire dans les années qui suivaient la mesure.

Par ailleurs, les chercheurs se sont intéressés à ce qui pouvait influencer l’évolution de la rigidité artérielle.

Ils ont observé que l’âge avait un effet sur la valeur de l’indice Cavi, mais aussi sur la progression de cet indice. Ainsi, au cours du vieillissement, celui-ci augmente plus rapidement. Ils ont également observé un impact de la pression artérielle : plus celle-ci est élevée plus l’indice Cavi l’est aussi.

L’indice Cavi, mieux adapté pour évaluer l’âge réel du système cardiovasculaire
Les scientifiques ont ensuite essayé de déterminer un seuil de rigidité artérielle qui serait associé à un risque cardiovasculaire accru et pourrait être communément reconnu et adopté par les cliniciens, dans l’optique de mettre en place un suivi plus poussé des patients. Ils ont observé qu’un indice CAVI ayant une valeur supérieure à 9.25 était associé à un risque cardiovasculaire élevé à partir de 60 ans.

Enfin, ils ont observé que les traitements pour le cholestérol ou le diabète avaient un effet sur le taux de progression de la rigidité artérielle.

Ces observations sont encore à l’étude mais suggèrent que certains traitements pourraient permettre de ralentir la progression de la rigidité artérielle. « Nos résultats suggèrent que l’indice CAVI pourrait être un outil de mesure de prédiction du risque cardiovasculaire, facile, rapide et non invasif.

Son recours pourrait figurer à l’avenir parmi la liste des examens recommandés en clinique pour prédire le risque cardiovasculaire d’une personne et lui apporter un suivi préventif », explique Magnus Bäck, premier auteur de l’étude.

« En plus d’un outil facile à déployer, celui-ci permettrait de déterminer l’âge réel du système cardiovasculaire », explique Athanase Benetos, dernier auteur de l’étude.

* L’étude Triple-A-Stiffness est une étude de cohorte longitudinale internationale ayant recruté plus de 2 000 participants âgés de plus de 40 ans issus de 18 pays européens. Parmi eux, 1 250 sujets (55 % de femmes) ont été suivis pendant une durée médiane de 3,82 (2,81 – 4,69) ans.

futura

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