Le juge d’instruction près le Tgi de Kédougou a placé hier sous contrôle judiciaire la gynécologue, l’infirmier et le technicien en réa arrêtés dans le cadre de la mort tragique de Mamy Doura Diallo et de son bébé. En décidant de ne pas suivre le réquisitoire du procureur qui avait demandé le mandat de dépôt pour homicide involontaire, il a pris une décision d’apaisement après que les agents de santé ont décidé de paralyser le système sanitaire pour protester contre leur arrestation.

C’est la désescalade. Le juge d’instruction près le Tribunal de Grande instance de Ké­dougou a inculpé les trois agents impliqués sur l’affaire Mamy Doura Diallo, décédée en couche ainsi que son enfant dans la nuit du 30 au 31 août. Evidemment, il n’a pas suivi le réquisitoire du ministère public, qui avait chargé les agents de santé. Dans son réquisitoire introductif, il avait requis le mandat de dépôt pour homicide involontaire et complicité de ce chef. Mais, le juge a opté pour l’apaisement…

En décidant de les inculper et de leur accorder une liberté provisoire, le magistrat-instructeur rabaisse la tension. Depuis l’arrestation de Léonce M. Faye et ses deux autres collègues, l’association des techniciens supérieurs en réanimation, des gynécologiques-obstétriciens des régions de Tam­bacounda et de Kédougou et le Syndicat autonome des médecins du Sénégal (Sames) ont décidé de paralyser le système sanitaire au niveau régional et national aussi. Pour eux, les agents mis en cause n’ont pas fauté dans l’exercice de leur fonction.

Dans son audit de l’affaire, le ministère de la Santé et de l’action sociale a aussi disculpé les trois agents. En effet, soulignent les services du département dirigé par Marie Khé­messe Ngom Ndiaye, «l’exploitation des différents documents» a permis de déceler «la présentation chez la femme de près de six facteurs de risque susceptibles de compromettre la grossesse et l’accouchement». Il est noté : «Les consultations prénatales de la femme au Poste de santé de Dalaba, avec les fiches de référence au Centre de santé de Kédougou pour une meilleure prise en charge de la grossesse, la prise en charge de la femme au Centre de santé de Ké­dougou le 30 août 2022 à son arrivée, conformément aux normes et protocoles en vigueur à travers l’indication de la césarienne et la réalisation de la visite pré-anesthésique dans les délais.»

Selon toujours cet audit, «l’exploration chirurgicale a retrouvé une rupture utérine sur une ancienne cicatrice avec propagation, ainsi qu’une hémorragie interne avec 500 ml de sang aspirés». Autre fait constaté, c’est que «devant les difficultés d’extraction du fœtus et l’absence de signes de vie dudit fœtus, une embryotomie a été réalisée». De même, renseigne la mission du ministère, «dans le but d’arrêter le saignement pour sauvetage maternel, une hystérectomie d’hémostase a été effectuée, suivie de la mise en place d’un drain pour évacuer le sang résiduel et surveiller d’éventuels saignements». Elle ajoute que «l’intervention a duré environ 3 heures de temps» et «en fin d’intervention, la patiente a présenté un arrêt cardiorespiratoire suivi d’une réanimation sans succès, le décès a été constaté à 19 heures».

Cette version est loin du réquisitoire à charge du procureur de la République près le Tribunal de Grande instance de Kédougou. Baye Thiam avait utilisé des mots durs pour qualifier le drame : incompétence notoire, une forte négligence médicale et un manquement manifeste aux règles élémentaires de la médecine… Pour lui, «l’analyse des faits de l’espèce, une forte négligence médicale ainsi qu’un manquement ma­nifeste aux règles élémentaires de la médecine ont été relevés».

M. Thiam souligne que «le comble s’est produit une fois au bloc opératoire, lorsque la gynécologue ainsi que l’anesthésiste ont délibérément décidé, sans même avoir préalablement consulté le mari de la défunte, de procéder à une hystérectomie, c’est-à-dire une ablation totale de l’utérus». En outre, explique le procureur, «les manœuvres de la gynécologue pour extraire le nouveau-né ont causé le décès de ce dernier». «Le billet de mort de l’enfant venait d’être froidement acté par ces actes dits médicaux, pour ne pas dire radicaux», a-t-il fustigé. Se basant sur «les déclarations spontanées des parties (personnel médical et le mari de la défunte)», le procureur soutient que celles-ci «indiquaient que le fœtus, à l’arrivée, était vivant car le mari, présent à l’accouchement, avait posé la question au médecin, qui lui a confirmé effectivement qu’il respirait».

Et de conclure : «Ces manœuvres en cascade ont très certainement provoqué une rupture utérine qui a conduit immédiatement au décès de la mère, suite à une hémorragie externe et un arrêt cardiaque, selon le rapport du médecin-chef du District sanitaire de Kédougou, transmis au Parquet le 31 août 2022.» Désormais, la vérité est entre les mains du juge d’instruction.
lequtidien

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