Méconnaissant l’importance de la philosophie, la doxa pense que c’est une discipline qui sert simplement à spéculer. Or la Philosophie est partout présente dans la vie quotidienne (sur des sujets politiques, journalistiques, environnementaux, la perte des valeurs sociales entre autre). D’abord, il faut rappeler qu’elle est la mère de toutes les sciences (Physique, Biologie, Géométrie etc.).

Et malgré l’autonomie de ces sciences, elles ont encore besoin de la philosophie ne serait-ce que pour des questions d’Ethique, de déontologie, de valeurs… C’est pourquoi aujourd’hui, la Science a besoin de la philosophie pour évoluer. Et l’on comprend dès lors, son enseignement en médecine (surtout sur des sujets sensibles comme l’Euthanasie…), en Physique et dans d’autres disciplines Techniques (notamment sur des questions liées à la création scientifique).

Le Sénégal fait partie des pays africains les plus respectés en matière d’éducation et de recherche. Son paysage universitaire est parmi les plus rayonnants en termes d’offres de formation. Cependant, il est également l’un des rares pays où l’enseignement de la Philosophe n’existe que dans une seule et unique faculté. Dans les pays développés (en particulier en Occident), la Philosophie fait partie des « disciplines-mères » qu’on enseigne dans presque toutes les UFR (Médecine, Mathématique, Science politique, entre autres). C’est pourquoi, nous pensons qu’il faut un département dans chaque université pour combler ce retard.

D’ailleurs, les responsables politiques reconnaissent, eux-mêmes, qu’il y a beaucoup d’efforts à faire dans ce sens. Lors de la cérémonie officielle de remise de prix aux lauréats du concours général (2022), le Président de la République est revenu longuement sur l’importance de l’enseignement des humanités (Ethique, Valeurs civiques, l’Art de vivre ensemble etc.) dans nos universités. Cette formation est plus que nécessaire pour éviter que la jeunesse sénégalaise tombe dans les pièges et les contre-valeurs de notre temps, dit-il.

L’enseignement de la Philosophie est nécessaire pour les raisons suivantes :

Premièrement, il y a un déficit énorme de professeurs de Philosophie (dans le secondaire) au Sénégal. L’État se trouve obligé de faire appel à des sociologues, des psychologues ou des étudiants en Lettres pour combler le gap. Il y a quelques années (vers 2014-2015), le Ministère de l’éducation nationale était sérieusement confronté à ce problème à telle enseigne qu’il était obligé de procéder à un recrutement très « spécial ». On demandait à tout étudiant titulaire d’une licence de Philosophie (et qui souhaite enseigner) de s’inscrire sur le site du Ministère car il y avait une vraie urgence…

Aujourd’hui encore la situation n’a pas évolué. En Septembre 2022, l’inspection d’Académie de Kaolack (pour ne citer que celle-ci) souligne un manque de 547 enseignants notamment dans des disciplines comme la Philosophie. D’après l’inspecteur Siaka Goudiaby : « au moins six lycées n’ont même pas de professeurs de Philosophie ». Il en est de même dans les autres régions (Tamba, Ziguinchor, Kolda, Matam etc.).

L’ancien ministre Serigne Mbaye Thiam avouait ouvertement que le Sénégal est confronté à une carence en professeur enseignant dans des disciplines comme la Philosophie à cause du nombre très faible de maîtrisards dans ce domaine. Il est évident, pour nous, que le problème s’explique par le fait qu’il n’existe qu’une seule Université qui forme dans cette branche. Ce qui est incompréhensible dans un pays comme le Sénégal. Les autorités étatiques ne soulignent le problème que lorsqu’il y a grèves ou manifestations des élèves (comme ce qui s’est passé à Podor il y a environ quelques années et dans d’autres localités).

philoEn ce qui concerne les responsables des autres universités, ils demandent à ce que le dossier soit porté par des enseignants de leurs propres universités. Ceci crée souvent des problèmes car beaucoup d’entre eux ne se sentent pas directement concernés. A cela s’ajoutent les lenteurs administratives. Ailleurs, on convoque des arguments liés aux difficultés structurelles ou matérielles comme le déficit de locaux ou des problèmes de budgets. Tout ceci démontre parfois un manque de volonté réel.

Deuxièmement, l’élargissement de l’enseignement de la philosophie permet de lutter contre le chômage de jeunes Docteurs-ès- philosophie et devient ainsi un moyen efficace pour participer à la création d’emplois. Car il faut souligner également qu’il y a très peu de recrutement dans la discipline.

Troisièmement, chaque année des centaines de bacheliers sont réorientés dans les autres branches parce qu’il n’y a pas suffisamment de places pour les accueillir étant donné qu’il n’existe qu’un seul Département de Philosophie. Ce qui fait qu’au bout du compte très peu d’étudiants arrivent à obtenir une formation suffisante pour enseigner (la FASTEF aussi accueille un nombre limité d’élèves-professeurs). Par conséquent, très peu de lycées au Sénégal bénéficient de deux ou de trois professeurs titulaires en Philosophie.

Dr Malao Kanté

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