Le poste de santé de Grand Médine, dans le district nord de Dakar, selon le découpage de la carte sanitaire, refuse du monde en cette matinée du mois de mai. L’établissement médical, parée de ses couleurs verte et blanche, située à cheval entre les quartiers dakarois Patte d’Oie Builders et Parcelles assainies, est le point de ralliement de patients, des femmes exclusivement, et de leurs accompagnants.

Comme tous les matins, la sage-femme Ramatoulaye Diouf Samb est à pied d’oeuvre pour assurer la surveillance et le suivi médical de ces dernières. Un travail quotidien qui trouve un écho particulier encore en cette journée mondiale de la sage-femme, célébrée le 5 mai de chaque année.

Le thème de cette édition, ”Sage-femmes : indispensables dans chaque crise’’, met en lumière leur rôle essentiel en tant que premières intervenantes auprès des femmes enceintes.

Après les salamalecs auprès de ses collègues, la chargée de communication de l’Association nationale des sage-femmes d’Etat du Sénégal (ANFEFS),

D’un geste presque machinal, Mme Samb, qui est également la chargée de communication de l’Association nationale des sage-femmes d’Etat du Sénégal (ANFEFS), enfile sa blouse rose et se met aussitôt au travail.

Sourire aux lèvres, stéthoscope à la main gauche, elle accueille ses patientes, une par une dans une atmosphère conviviale.

Une sage-femme doit être disciplinée et bien formée

Après 20 ans de pratique, elle a su établir une relation de confiance avec ses patients. ‘’Pour réussir à établir une relation de confiance, la sage-femme doit avoir de la discipline adossée à une bonne éducation de base. En plus de cela, il faut être bien formé et méticuleuse à la tâche’’, explique-t-elle.

Mme Samb n’a pas acquis son expertise du jour au lendemain. ‘’J’ai eu la chance d’être formée par une sage-femme qui a eu 17 ans d’expérience dans ce poste de santé. J’ai vécu les 12 ans sous son aile. Elle m’a appris la patience, le sens de l’écoute pour pouvoir aider’’, dit-elle reconnaissante, assise derrière son bureau.

Dehors, dans un couloir, une trentaine de femmes, bébé sur le dos ou sur les jambes, attendent leur tour pour se faire consulter.

Elles en profitent pour écouter religieusement la causerie d’Astou Diouf, une +bajenu gox+ (marraine de quartier). Cette actrice communautaire est venue ce matin-là sensibiliser sur l’intérêt de suivre les prescriptions médicales, l’importance de l’allaitement maternel exclusif durant les six premiers mois du bébé, et de la planification familiale.

D’un air taquin, Mme Samb lance à l’une d’elles : ”Tu as les airs d’une femme enceinte”. ‘’Ah non, j’ai pris mes précautions grâce à toi. ‘’S’il n’y avait pas de sage-femme, je me demande ce que nous serions devenues, vous nous aidez à gérer notre vie de couple et de famille’’, répond-t-elle faisant référence aux méthodes de planification familiale.

De temps en temps, des cris de bébés fusent, tandis que la sage-femme rejoint l’assistance pour renforcer la sensibilisation sur les cancers féminins (du col de l’utérus et du sein).

‘’Nous vous invitons à venir voir les professionnels de santé en cas de problèmes.

Les explications médicales vous permettent de prévenir ces cancers qui font des ravages’’, lance-t-elle en clôturant la séance de causerie.

Grossesse, planification familiale, gynécologie : principaux motifs de consultation

Après cette séance de sensibilisation, le travail de consultation reprend. Sur la table de Ramatoulaye Diouf Samb sont posés cinq registres : un pour le dépistage et le traitement des lésions précancéreuses, un pour les consultations prénatales, un pour la planification familiale, et un autre pour les consultations post-natales et pour les consultations générales.

Les murs du bureau sont tapissés d’affiches de sensibilisation sur la grossesse et l’accouchement.

Il est également question de l’espacement des naissances, du développement fœtal. Autant de messages qui font écho aux types de consultations auxquelles peuvent avoir droit les femmes. Au fond du bureau se trouve le lit où les patientes sont auscultées.

Les sage-femmes et les maïeuticiens sont présents auprès des futurs parents à chaque étape de la grossesse et de la parentalité. Ramatoulaye Diouf Samb en a fait sa mission au quotidien.

Une jeune dame au teint noir, de taille moyenne, est venue pour sa deuxième visite prénatale. Elle ressent des douleurs au dos. Après l’avoir examinée, la sage-femme la rassure. ‘’Tout est normal, la tension est normale. Le bébé bouge.

C’est le poids de la grossesse qui commence à faire ses effets mais ce n’est rien’’, dit la professionnelle.

Mme Samb l’oriente vers sa collègue qui occupe le bureau d’en face, afin qu’elle lui prescrive les médicaments anti paludiques et du calcium. Elle demande à la parturiente de continuer à prendre des fers afin de prévenir l’anémie et lui conseille d’éviter le stress. La sage-femme l’oriente vers le centre de santé Nabil Choukair pour faire un bilan de santé.

Une deuxième patiente, une jeune femme qui a accouché au mois de février, est venue pour renouveler sa contraception. Mme Samb l’examine pour voir si elle n’a pas d’infection.

Bonne nouvelle.

La jeune maman se porte bien. Elle s’inquiète de l’absence d’aménorrhée. La sage-femme se veut rassurante, lui expliquant que la méthode contraceptive utilisée agit sur l’utérus. Par conséquent, elle perturbe un peu le système. Selon elle, le ‘’councelling’’, c’est-à-dire la séance d’explication, se fait avant même le choix des femmes sur les méthodes de contraception.

Convaincue, la jeune maman peut prendre sa piqûre à renouveler, qui la préservera d’une grossesse durant 3 mois. Elle reviendra au mois d’août pour son rendez-vous.

Une troisième patiente est venue prendre des conseils. Elle déclare n’avoir pas vu ses règles depuis le mois dernier et est sujette à des vomissements et des vertiges. Après avoir décrit ses symptômes, la patiente est invitée à s’allonger sur un lit. Après l’avoir examinée, la sage-femme demande à cette mère de deux enfants de faire le test de grossesse et de revenir pour une échographie afin de dater une possible grossesse.

Après plusieurs heures de consultation, une autre sage-femme prend le relais et reprend les mêmes procédures. Ainsi, se déroule la journée d’une sage-femme, selon Ramatoulaye Diouf Samb.

S’investir pour prévenir les décès évitables, leur sacerdoce

Elle rappelle que les sage-femmes sont en première ligne pour aider, écouter et conseiller les jeunes parents. Elles accueillent chaque nouveau-né en toute sécurité et prennent soin de lui pendant ses premiers instants de vie.

Exerçant un large éventail d’activités, les sage-femmes assurent des accouchements sécurisés, des soins prénatals et post-partum et donnent des conseils sur l’importance de l’allaitement.

Elles peuvent aussi suivre les jeunes filles et les femmes en bonne santé sur le plan gynécologique (frottis, contraception, avortement médicamenteux, dépistage de cancers ou infections, traitements, etc.) et les oriente vers des médecins spécialistes en cas de pathologies.

Ramatoulaye Diouf Samb soutient que la joie de voir la femme accoucher en bonne santé et son nouveau-né en train de téter constituent la plus grande satisfaction qui fait qu’elle aime sa profession comme nulle autre.

‘’Nous sommes des professionnelles.

Nous nous soucions des cas urgents d’abord, avant de gérer les cas les moins graves. Nous ne parlons jamais de notre vécu en salle d’accouchement. Mon sentiment le plus joyeux c’est de voir la femme qui vient d’accoucher rire et le nouveau-né en train de pleurer. C’est indescriptible ! ’’, s’enthousiasme la sage-femme.

‘’Les rares cas de décès maternels et néonatals que j’ai rencontrés étaient liés à un retard dans la prise en charge de la grossesse ou des rendez-vous non respectés dans le suivi de la grossesse’’, précise-t-elle, soulignant que ces cas de décès sont donc ‘’évitables”.

Selon Mme Samb, une sage-femme doit se battre au quotidien pour prévenir les décès évitables, notamment dans ces quartiers modestes où elle évolue modeste, et où elle joue le rôle à la fois un rôle de mère, d’assistante sociale et de sage-femme.

‘’La chance que nous avons, c’est que les populations sont à l’écoute des professionnels de santé. Notre communication porte. Ce qui fait que nous n’avons pas de souci majeur’’, explique-t-elle.

Profitant de la venue de l’APS dans son lieu de travail, la chargée de communication de l’Association nationale des sage-femmes d’État du Sénégal plaide pour la mise en place d’un ordre national, comme chez les médecins, par exemple, qui permettra d’avoir des modèles et des sage-femmes d’élite.

aps

Part.
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