Organe encore mystérieux, l’appendice s’avère aujourd’hui avoir un rôle essentiel pour certaines maladies. Une équipe de chercheurs français vient ainsi de montrer qu’il protège les primates de diarrhées infectieuses.

Longtemps considéré comme un vestige inutile de l’évolution, l’appendice iléo-caecal (plus communément appelé « appendice ») se révèle de plus en plus jouer un rôle positif dans notre santé. Des chercheurs de l’Inserm, du CNRS, du Muséum d’Histoire Naturelle, de l’Université de Rennes, de Sorbonne Université et du centre Eugène Marquis se sont intéressés au lien existant chez les primates entre l’existence d’un appendice et la survenue de diarrhées infectieuses. Ils ont publié les résultats de leurs travaux dans la revue Scientific Reports.

L’appendice a un rôle dans la survenue et la sévérité des diarrhées infectieuses
« Tous les primates ne possèdent pas cette petite excroissance cylindrique du gros intestin, explique Eric Ogier-Denis, directeur de recherche (Inserm/Université de Rennes/ Centre Eugène Marquis). Apparu au cours de l’évolution, il est ainsi présent entre autres chez tous les grands singes, les lémuriens et bien évidemment chez l’être humain. Mais d’autres primates n’en possèdent pas du tout. Nous voulions vérifier si cet organe avait une incidence sur la survenue et la sévérité des diarrhées infectieuses. »

De précédents travaux avaient montré à l’équipe de scientifiques que les espèces de mammifères possédant un appendice avaient tendance à vivre plus longtemps que celles qui en étaient dépourvues. Cette fois, elle a voulu aller encore plus loin et identifier les raisons pouvant expliquer ces différences dans la longévité.

Pour ce faire, les chercheurs ont passé au crible les dossiers vétérinaires de 1251 primates de 45 espèces différentes résidant en semi-liberté au parc zoologique « La Vallée des Singes » à Romagne (Vienne). S’étalant de 1998 à 2018, ces données leur ont permis de noter la fréquence et la sévérité des épisodes de diarrhées chez ces animaux diversement dotés en appendice : 13 espèces en possédaient, 32 n’en présentaient pas.

Le résultat est sans appel : non seulement, les primates avec appendice faisaient beaucoup moins de diarrhées infectieuses (environ -85%) mais celles-ci étaient bien moins sévères, notamment durant le premier quart de vie, période où le risque est maximal. Un résultat particulièrement intéressant, les primates étant un ordre animal très touché par ces affections. L’humain n’est pas épargné puisque les diarrhées infectieuses représentent la seconde cause de mortalité chez les enfants entre 1 mois et 5 ans.

Une forme en cul-de-sac permettant la sanctuarisation de bactéries
Si l’appendice a un tel rôle protecteur, c’est sans doute, spéculent les chercheurs, grâce à sa forme en cul-de-sac permettant la sanctuarisation de bactéries qui se retrouvent ainsi à l’abri du flux fécal et constituent un réservoir de flore intestinale saine. « On pense effectivement que la forme de cet organe est importante, explique Eric Ogier-Denis mais pas seulement.

Son contenu bactérien ainsi que sa composition en tissu lymphoïde riche notamment en lymphocytes joueraient un rôle durant les premières années de vie pour éduquer les cellules mémoires du système immunitaire. »

Si l’appendice est apparu au cours de l’évolution, c’est peut-être qu’en protégeant des diarrhées sévères durant la première partie de la vie, il offre à son porteur un avantage évolutif au moment où celui-ci se trouve en âge de se reproduire.

L’appendice reste un organe mystérieux
Pour autant, l’appendice reste un organe très mystérieux et encore totalement inexploré. Les chercheurs savent aujourd’hui qu’il joue un rôle protecteur vis-à-vis de certaines affections comme la rectocolite hémorragique, ou d’autres maladies inflammatoires. On le suspecte également d’en avoir pour la maladie de Crohn.

Problème : on ignore toujours quelles sont les bactéries contenues dans ce réservoir. Pour deux raisons : sa difficulté d’accès rendrait la recherche de son contenu bactérien trop invasive et risquée. D’autre part : lorsque l’appendice est ôté suite à une appendicectomie, celui-ci ne contient plus un réservoir bactérien sain.

On peut en tout cas se féliciter que l’appendice soit de moins en moins considéré comme un organe vestigial superflu par le corps médical.

“Durant un temps, dans les années 70-80, rappelle le chercheur, lorsque l’on opérait des enfants dans les mêmes zones intestinales, il arrivait que l’on enlève systématiquement leur appendice par la même occasion. Mais, ce n’est plus le cas aujourd’hui.“

Enfin, rassurons ceux qui ont entendu leurs grands-parents les sermonner « n’avale pas ton chewing-gum ou tes ongles, ça va remplir ton appendice et le crever ». Qu’ils se rassurent, c’est totalement faux, ça ne leur causera pas une appendicite ou une péritonite pour autant.

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