Prendre ses repas tôt serait synonyme d’une meilleure santé ! Des chercheurs français et espagnols ont constaté que la prise des repas de bonne heure était associée à une diminution du risque de maladies cardio et cérébrovasculaires. Pour aboutir à ces résultats, ils ont analysé les habitudes alimentaires de plus de 100.000 personnes sur 13 années.

« On sait que la qualité de notre alimentation influe sur notre santé, et notamment sur le risque de maladies cardiovasculaires, mais nos résultats indiquent que l’heure des repas n’est pas à négliger non plus ! », résume le docteur Bernard Srour, professeur à l’Equipe de Recherche en Epidémiologie Nutritionnelle (Inrae, Inserm, Université Sorbonne Paris Nord) et coordinateur de l’étude, lors d’une interview pour Sciences et Avenir.

Limiter la consommation de viande rouge et de charcuterie, manger 5 fruits et légumes par jour et davantage de céréales complètes…

À ces recommandations du Programme National Nutrition Santé (PNNS) pourrait désormais s’ajouter un petit déjeuner et un dîner de bonne heure. Une équipe de chercheurs de l’Inrae et de l’Institut de santé global de Barcelone a suivi une cohorte de 100.000 volontaires et analysé leurs habitudes alimentaires entre 2009 et 2022. Les résultats de leurs observations ont été publiés dans la revue Nature Communications.

Un suivi rigoureux
A raison de trois enquêtes tous les six mois, les volontaires ont renseigné leurs consommations alimentaires et autres habitudes de vie. « Aussi bien leur consommation d’alcool et de tabac que l’heure et la composition de leurs repas, précise Bernard Srour. Ces données nous ont permis d’établir un lien entre le rythme des repas et le risque de maladies cardiovasculaires. »

Dans les caractéristiques de la cohorte, un chiffre interpelle : 79 % de femmes.

D’autant plus surprenant que les femmes ont longtemps été sous-représentées dans certains types d’études, les essais cliniques, même si, aujourd’hui, la loi européenne exige que ces essais portent sur des individus des deux sexes. La raison d’une telle proportion de femmes ? Il s’agit d’une cohorte basée sur le volontariat. Les femmes sont souvent davantage représentées dans ces études, et d’autant plus quand il s’agit de nutrition.

« Dans l’idéal, il aurait fallu quelques hommes en plus », indique le chercheur. « Cela pourrait constituer un léger biais dans nos résultats. » Toutefois, l’étendue de la cohorte, de plus de 100.000 individus, atteste de la fiabilité de ces observations.

Manger le plus tôt possible
Commençons par le petit déjeuner ! D’après cette étude, le risque de maladie cardiovasculaire augmente à mesure que la première prise alimentaire est retardée. Ainsi, ce risque s’accroît de 6% par heure. « Par exemple, une personne qui a pour habitude de petit-déjeuner à 9 heures, aurait 6% de risque en plus d’avoir une maladie cardiovasculaire qu’une personne qui a l’habitude de manger à 8 heures », illustre Bernard Srour.

Quant au repas du soir, dîner après 21 heures augmenterait le risque de maladie cérébrovasculaire (comme les AVC), de 28%, par rapport à la prise de repas avant 20 heures.

D’après les auteurs, l’idéal serait également que la durée du jeûne nocturne, entre la dernière prise du soir et la première du matin, soit la plus élevée possible. Leurs observations témoignent en effet d’une diminution du risque de maladie cérébrovasculaire dans ces cas. Des résultats en faveur, donc, d’un petit déjeuner et d’un dîner de bonne heure.

Mais comment expliquer l’influence du rythme alimentaire sur le risque de maladies cardiovasculaires ? Ces travaux d’observation fournissent un constat sur un grand nombre d’individus. Mais les processus métaboliques à l’origine de ces résultats sont encore inconnus. Une partie de la réponse pourrait se trouver dans le fonctionnement de nos horloges internes. « On sait que les horloges biologiques régulent une partie de notre métabolisme. Et celles-ci peuvent être influencées par des facteurs externes. La lumière par exemple.

L’alimentation, elle, régule l’horloge interne du foie », souligne Bernard Srour.

De précédents travaux sur la souris relataient également une augmentation des processus inflammatoires en cas d’alimentation pendant la phase de repos, « tels qu’une perturbation du microbiote par exemple ». Une combinaison de ces facteurs pourrait expliquer le lien de causalité entre l’heure des repas et la régulation de la tension artérielle.

Les chercheurs souhaitent à présent analyser les prélèvements urinaires et sanguins d’une partie de la cohorte pour éclairer leurs observations et identifier les processus métaboliques qui en sont responsables.

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