L’information sanitaire n’est pas de la meilleure des manières, représentée dans les médias. Ainsi en est-il de celle scientifique. Ce concernant, il y a des pourquoi. Des parce que, aussi, existent.

Elle a mis à nu la «fragilité de nos systèmes de santé». «De grandes divergences dans le monde scientifique» en sont nées et il a été constaté un «flop sur la campagne de vaccination». Ce sont là des leçons tirées de l’avènement du Covid-19. On ne parle presque plus de ce mal. «On», beaucoup de monde, mais pas Ouestaf. Et au-delà du Covid, la question de la place de l’information scientifique en général et sanitaire en particulier intéresse la structure qui a réuni des experts pour en discuter.

L’un d’eux, le Dr Amadou Sow, pense que «ce qu’on est en train de donner comme information dans les médias sur le volet santé peut être amélioré dans la mesure où on parle plutôt de maladies, de symptômes…».

Sur ce point précis des maladies et symptômes, la seule attitude journalistique qui vaille, selon le spécialiste en médecine légale, est d’inciter les populations à aller vers les praticiens de la médecine et de s’en remettre à leur savoir-faire. Pas besoin d’épiloguer, soutient M. Sow. «Par contre, continue-t-il d’argumenter, on doit les aider à mieux prévenir ces maladies-là…

Mais, surtout aussi, aborder d’autres problématiques» telles que «le parcours de soins».

Est-ce que beaucoup de personnes sont informées de l’organisation du système de santé ? Pourquoi les gardes, les permanences ? Des questions du genre seront posées par le panéliste, qui a d’ailleurs sa propre idée. Il croit en effet que «ce sont des questions qui ne sont pas suffisamment abordées».

Des questions de grande importance d’une part, et, d’autre part, des questions primordiales abordées de la mauvaise manière : ainsi en est-il des affaires médicales dans les médias sénégalais, si l’on en croit M. Sow. Et qui regrette que les problèmes ou contentieux médicaux soient pour la plupart traités sous un angle sensationnel.

Se spécialiser dès l’école
Lorsqu’on en vient à devoir traiter de l’information scientifique, le journaliste que caricature M. Sow est dans la posture de celui qui avale docilement des pilules. C’est à la limite un micro tendu, et qui laisse un «expert» faire son «one-man show». Sans relance. Sans contradiction. Et, «parce que le journaliste ne s’y connaît pas». D’où l’importance de la spécialisation.

La spécialisation, bien avant les structures médiatiques, doit être l’affaire des écoles de formation.

Telle est la conviction de Yacine Ndiaye, qui a représenté l’Institut de recherche pour le développement (Ird) au panel qui s’est tenu le 17 avril 2024. Elle a ainsi plaidé pour la création de filières dédiées dans les écoles de journalisme, et qui permettront aux journalistes de mieux aborder les questions scientifiques, de mieux se situer par rapport au traitement de l’information relative au champ des sciences.

Pour sa part, l’Ird fait dans l’accompagnement via des formations pour au moins intéresser le monde des médias à celui de la science. Même si, comme reconnu par la responsable de la communication de l’Ird, beaucoup reste à faire.

Le temps du journalisme n’est pas celui de la recherche scientifique.

C’est un fait. Autre fait : ce n’est pas qu’aux journalistes d’aller vers les scientifiques. Le chemin inverse est imaginable. Il n’est pas qu’imaginable dans l’esprit d’un autre panéliste : il est obligatoire. «Le travail scientifique est fait au nom des communautés», ceux qui le produisent étant payés par les taxes collectées auprès de ces dernières.

Une fois que le travail de recherche est fait et qu’il est validé, soutient le Dr Wone, les chercheurs «ont aussi obligation d’aller vers les communautés et de leur donner cette information».

Pour ce qui est de la présence de la science sur les plateaux de télévision, M. Wone considère ceci : «Le truc, c’est que si on reste dans notre Fac et qu’on ne va pas vers les médias (…) c’est clair que quelqu’un qui n’y connaît rien ou qui y connaît peu, va prendre notre place.»

«Quelqu’un qui n’y connaît rien ou qui y connaît peu», par exemple, qui sait faire des schémas face caméra et qui débite, avec plus ou moins d’aisance, sa connaissance. Ou, «sa non-connaissance», pour reprendre le Dr Wone.

Quid du langage et de la terminologie scientifiques qui peuvent paraître hermétiques et ainsi constituer un frein à la vulgarisation par les journalistes ?

Un travail d’épuration du langage doit se faire. Et ce préalable n’est pas, selon M. Wone, forcément le travail du journaliste. «Les terminologies utilisées, scientifiques, ont une traduction connue par les praticiens» qui produisent les articles à exploiter par les journalistes. Et, «c’est à eux d’aller vers cette communication» d’épuration qui prépare la vulgarisation.

Si l’espace est occupé par les gens qui ne devraient pas y être, conclut l’expert, c’est parce que ceux qui devaient l’occuper l’ont déserté.

Lequotidien

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