Madame la Directrice générale, Fgi est une Société de gestion et d’intermédiation (Sgi) présente sur le marché financier depuis 2019. Quel est votre modèle d’affaires et votre champ d’intervention ?
Effectivement, Fgi a démarré son activité en 2019, juste avant le début de la pandémie de Covid 19. Rejoignant plus de 30 Sgi déjà agréées sur le marché financier régional, elle s’est vite positionnée en proposant des offres innovantes et adaptées aux besoins des clients, tant en matière de financements structurés que de placements financiers.
Nous proposons aux entreprises privées ou publiques, ainsi qu’aux investisseurs institutionnels un conseil adapté à leurs besoins pour toutes les opérations liées au développement de leurs activités, telles que les levées de fonds en capital ou en dettes, les opérations de haut de bilan (cession, ouverture de capital, augmentation de capital, etc.).
Quelle appréciation faites-vous du marché financier sous régional et plus spécifiquement du marché financier sénégalais ?
Depuis quelques années, nous assistons à des crises inflationnistes dues à une baisse de la production vivrière des campagnes 2021 et 2022, combinées à la situation de crises politiques et sécuritaires dans certains pays de la zone, ayant entrainé des difficultés réelles d’approvisionnement des marchés.
A cela, il faut ajouter les tensions géopolitiques en cours au niveau mondial et aussi dans la zone Uemoa. Pour remédier à ces problématiques, les autorités monétaires ont adopté des mesures fortes pour lutter contre l’inflation.
Cette situation a créé une tension de liquidités sur le marché par adjudication poussant les Etats également à lever des fonds sur le marché obligataire.
Ce dernier, offrant aussi des rentabilités appréciables, a suscité un très fort intérêt chez les investisseurs attirés par ces émissions qui disposent ainsi de garantie souveraine.
Cela a permis aux Etats de l’Uemoa, et au Sénégal en particulier, de lever des fonds pour le financement de leurs politiques de développement socio-économique. Ainsi, après avoir ralenti ses émissions obligataires entre 2018 et 2021, le Sénégal est revenu en force et, à travers trois emprunts obligataires, a levé près de 400 milliards de FCFA entre 2022 et 2023.
Par conséquent, la capitalisation obligataire du marché financier sous régional a progressé de 15,4%, par rapport à 2022, s’établissant à 10 302 milliards en 2023.
Quant au marché des Actions de la Brvm, il a été particulièrement marqué ces dernières années par l’entrée en bourse de plus de huit (8) sociétés entre 2015 et 2023, parmi lesquels Orange CI, qui à elle seule a représenté un record de capitalisation à l’introduction en bourse avec 1431,23 milliards de FCFA, après la clôture par anticipation de son Offre publique de vente (Opv) d’actions pour un montant de 140,982 milliards de FCFA.
De plus, les indices s’affichent au vert à la fin de l’année 2023, avec une progression annuelle de l’indice global, le Brvm Composite, de +5,38%.
Notre société de télécommunications, Sonatel, est la plus grosse capitalisation de notre bourse commune et représente à elle seule plus de 22,57% du marché des actions de la Brvm au 31 décembre 2023. La capitalisation globale des actions est de 7 966,96 milliards de FCFA au 31 décembre 2023, en progression de 5,38% par rapport à 2022.
Avec une capitalisation boursière de 12,86 milliards de dollars américains, la Brvm dépasse la Bourse kenyane et se classe juste derrière la Bourse de l’Egypte dont la capitalisation boursière est de 43,43 milliards de dollars.
Cette situation s’explique notamment par l’augmentation de la capitalisation de la Brvm à la suite de l’entrée de la société de télécommunications Orange Côte d’Ivoire en décembre 2022 et de la bonne tenue du marché financier de l’Uemoa en 2023.
Nous pouvons donc dire que le marché financier régional s’est montré résilient malgré un contexte économique et politique difficile et garde ainsi toute son attractivité pour les investisseurs. Nous pouvons rester optimistes quant à sa capacité d’attirer d’autres investisseurs en dehors de ceux déjà présents sur le marché financier régional.
Vous êtes la première Sgi sénégalaise, et parmi les cinq premières Sgi de l’Uemoa, à être sélectionnée pour intégrer le projet d’interconnexion des marchés boursiers africains. Comment avez-vous vécu cela et quel bilan en faites-vous à la date d’aujourd’hui ?
Au démarrage effectif du projet d’interconnexion des bourses africaines, marqué par un live trade inaugural le 07 décembre 2022 à Abidjan, Fgi a eu l’honneur d’effectuer la première transaction au niveau de la plateforme numérique de l’Aelp.
Comme vous le savez, (l’Aelp)-African Exchange Linkage Program– est un projet de l’Union africaine visant à interconnecter toutes les bourses africaines et ainsi offrir une plateforme inégalée de plus de mille sociétés cotées du nord au sud et de l’est à l’ouest du continent africain.
C’est un projet dont l’ambition est de fortifier une place financière africaine commune.
Fgi, pour sa part, a déjà noué des partenariats avec les sociétés de courtage évoluant dans les autres places boursières, telles que le Nigeria et le Kenya, permettant ainsi à ses clients d’accéder à ces marchés.
Lors de la dernière conférence annuelle de l’Association des Bourses africaines (Asea), Fgi a eu l’honneur d’effectuer un live Trade avec Dyer & Blair Investment Bank, courtier en valeurs mobilières à la Bourse de Nairobi (Nse), sous la présence effective de William Ruto, Président de la République du Kenya.
Nous avons accueilli cette distinction avec beaucoup de fierté et de responsabilité, car nous avons la lourde charge de réussir cette aventure, qui permet aujourd’hui aux investisseurs et aux épargnants d’investir sur d’autres marchés, et accéder ainsi à une diversification et une rentabilité appréciable de leurs investissements.
Fgi offre un portefeuille relativement diversifié de produits et services. Pouvez-vous nous en dire davantage ? Quelles sont les principales cibles et segments de marché couverts ?
La Sgi Fgi travaille avec différents types de clients. Cela va des personnes physiques souhaitant rentabiliser leur épargne ; aux Pme pour des solutions de financement et la gestion de trésorerie ; en passant par les Institutionnels et les grandes entreprises pour des levées de fonds et la gestion de trésorerie et les Etats pour mobiliser des ressources sur le Marché Financier Régional et financer leurs investissements.
La Sgi Fgi cible aussi dans son portefeuille les collectivités locales ayant l’autonomie de financer leurs programmes sur le Marché financier régional et les investisseurs étrangers désirant intervenir sur le Marché financier régional.
Dans le domaine de la levée de fonds, en particulier, les opérations d’augmentation de capital et/ou d’émissions d’emprunts obligataires (Appel Public à l’Epargne ou par placement Privé), quels sont les « success stories » et les segments ?
Fgi est très active dans le soutien des Etats pour la mobilisation des ressources. Outre l’expérience significative de certains collaborateurs de Fgi en matière de collecte de souscriptions sur le marché financier, en cinq (05) ans d’activité, nous avons été actifs en matière de collecte de souscriptions pour les émissions du marché financier (3 500 milliards de FCFA en moyenne sur les 05 dernières années notamment sur les Emprunts souverains y compris les Fctc).
Ceci nous permet de bénéficier régulièrement de collaborations stratégiques avec d’autres confrères, ou acteurs en quête de partenaires pour la mobilisation de ressources financières sur le marché financier. Ainsi, nous en sommes à notre 6ième mission de co-chef de file d’un emprunt obligataire pour l’Etat de Côte d’Ivoire.
Fgi s’investit invariablement pour le développement de la culture boursière des populations. Quels sont les outils et canaux de dissémination utilisés ? Y a-t-il encore des défis à relever dans ce sens ?
Sensibiliser les populations à adopter une culture boursière constitue aujourd’hui un enjeu majeur pour le développement du marché boursier. A Fgi, nous avons opté pour des campagnes ciblées, de manière pédagogique, auprès des populations (commerçants, professions libérales etc….), des dirigeants de société, bref des épargnants en général pour leur permettre d’acquérir les compétences nécessaires qui leur permettront de prendre les bonnes décisions en termes d’épargne ou d’investissement.
Cela se fait par le biais de webinaires, de campagnes sur le terrain avec des rencontres B to B, des spots vidéo pour parler de la bourse en termes simples et compréhensibles pour les profanes.
Il est clair que pour atteindre l’objectif d’inculquer une éducation d’épargne et d’investissement à nos populations, un travail continu et à long terme est nécessaire autant sur le terrain qu’à travers les supports média.
Ces différentes actions combinées avec des politiques de formation et de vulgarisation des produits financiers, de la part des autorités, permettront de développer l’inclusion financière et ainsi stimuler le développement de la culture boursière chez les populations.
C’est la seule façon de développer une culture d’épargne pouvant permettre de contribuer au financement de l’économie de nos pays de manière interne.
L’élargissement de la base des investisseurs reste toujours un enjeu de taille pour les Sgi et les autres intervenants du marché. Quelles sont les stratégies déployées par Fgi et les contraintes spécifiques notées ?
Dans le marché, nous avons un nombre restreint d’investisseurs alors que les besoins de financements des Etats et des entreprises augmentent d’année en année à cause, notamment, de la croissance démographique et de l’urbanisation qui créent des besoins de plus en plus accrus.
Pour notre part, nous pensons que l’approfondissement de la base des investisseurs passera nécessairement par leur meilleure connaissance du marché financier de notre zone. Nous avons donc adopté une stratégie de divulgation de la culture boursière et n’hésitons pas à enrôler de nouveaux partenaires potentiels investisseurs en dehors de notre zone économique.
Les métiers de la finance connaissent des mutations profondes et une remise en cause des modèles de fonctionnement des marchés financiers avec les évolutions récentes des technologies disruptives telles que la Blockchain, le Big Data, l’intelligence artificielle etc … Quelle lecture en faites-vous et comment y faites-vous face ?
La combinaison de ces technologies disruptives permet aux investisseurs d’avoir tous les outils (données statistiques etc.…) nécessaires pour une bonne prise de décision. En outre ces différentes évolutions permettent une fluidité et une rapidité non négligeable des opérations financières.
Elles renforcent leur fiabilité en offrant une sécurité accrue, tout en limitant la part d’erreur qui peut découler de l’intervention de l’homme. Toutefois, à ce stade, il faut noter l’absence de réglementation dans ce domaine dans notre marché.
Dans le cadre de la montée en puissance, quels sont les projets et chantiers de Fgi?
Fgi a dans son Adn ce souci de création de valeur pour ses clients et partenaires. Nos différents projets et chantiers en cours collent parfaitement à cet objectif de satisfaction de nos clients et partenaires en leurs offrant de nouveaux produits d’investissement innovants adaptés à leurs objectifs, lesquels combinent la performance avec la maîtrise des risques, et de nouvelles stratégies de levée de fonds pour leur permettre de financer leurs différents besoins.
Parmi nos différents chantiers, nous pouvons citer dans leurs grandes lignes, par exemple le développement de l’interconnexion des marchés boursiers africains (Aelp), la poursuite des campagnes d’inclusion financière et de formation pour les potentiels épargnants et investisseurs africains, la multiplication de partenariat avec les acteurs financiers étrangers.
Lejecos Magazine