Jeudi dernier, pour son avant-première nationale, le film «Le Mouton de Sada», réalisé par Pape Bouname Lopy, projeté à Canal Olympia Teranga Dakar, a rencontré son vrai public. Occasion pour le jeune réalisateur, Pape Lopy, de déclarer devant les spectateurs qu’il faut construire le cinéma avec de la rigueur et de l’audace.
Le titre ne s’invente pas. Il faut le dire, il a été bien choisi comme le montre l’intérêt du public venu en grand nombre, jeudi dernier à Canal Olympia, pour la découverte du film fiction : Le Mouton de Sada. Composé en majorité de cinéphiles, d’amoureux du 7e art, mais aussi de l’équipe du film, personne n’a voulu rater l’avant-première de ce premier long métrage de Pape Bouname Lopy, plus connu sous le nom de Pape Lopy.
D’une durée de 79 mn, il met en exergue la complicité entre Sada, neuf ans, qui a tissé une très forte relation d’amitié avec un mouton «Dou».
Mais à quelques jours de la Tabaski, Babou Diop, son père, se rend compte que le mouton, qui est destiné au sacrifice, a disparu et son fils aussi. Désemparé, il part à leur recherche. A force de chercher, Babou finit par les retrouver. Mais des retrouvailles qui ne sont pas sans conséquences car Babou se retrouve dès lors face à un dilemme. Résolu à tuer son mouton pour sauver sa dignité, mais Sada refuse cette mort pour «Dou».
De cette situation malheureusement compliquée, le réalisateur fait une histoire sensible.
Et cela grâce à une esthétique travaillée, des dialogues bien développés, une musique qui accompagne l’intrigue sans prendre le dessus. Une ambiance électrique et stressante qui plonge les spectateurs dans les dernières semaines de la célébration de la Tabaski, notamment en banlieue dakaroise pour celles et ceux qui ne disposent pas de moyens de faire le sacrifice.
On le sent d’ailleurs dans toutes les scènes du film, comme si le réalisateur a voulu faire un film d’auteur en l’écrivant à sa manière, comme il pense, pour transmettre sa propre vision de la société sénégalaise, de la réalité, surtout que l’histoire se passe dans un environnement qu’il avait lui-même connu et vécu. «Quand je fais un film, je vais vers la réalité des choses parce que pour moi, un film doit venir de nous, de notre vécu.
Et ce film est une histoire du Sénégal qui a existé et que je veux raconter.
Donc, je fais confiance à cette réalité, à cette société, à ses enfants, mais aussi à ces pères de famille qui peuvent ressentir la même chose dans la vie réelle et dans le film aussi», a déclaré Pape Lopy à la fin de la projection.
Le film comme une sorte d’effet miroir
Le film dont l’acteur principal est un mouton «Dou» est une allégorie pour dire que nous vivons dans une société où le paraître a pris le pas sur les valeurs humaines. Une société où la tradition, semble-t-il, a pris le dessus sur l’obligation religieuse (fêter la Tabaski).
A travers ce film, Pape Bouname Lopy a voulu aussi produire une œuvre exceptionnelle en abordant plusieurs problématiques qui touchent la société. Pour Sada, rien ne l’arrête, seul le bonheur du mouton le préoccupe. Dans son imaginaire, le mouton, «Dou», est un membre à part entière de la famille. «Entre le mouton et Sada, c’est une amitié sincère. Il faut le comprendre ainsi», dit Coumba, la maman de Sada, à Babou Diop dans le film.
Une amitié que le spectateur ressent dans toutes les scènes de la production.
Un film universel qui se regarde en famille. Un film qui draine des passions. Occasion pour Pape Lopy de souligner qu’il va rencontrer son vrai public. «Le film va rencontrer son vrai public. Ce sont les histoires des gens de Dakar. On a envie d’exprimer et d’explorer nos sentiments et points de vue sur notre société de par le cinéma. Et ce film est comme une sorte d’effet miroir.
C’est un film sincère. Un film de combat. Donc, construisons notre cinéma avec de la rigueur, avec de l’audace. On a besoin d’un cinéma qui va trouver sa valeur, qui va être regardé par notre public», explique le réalisateur avec fierté, tout en indiquant que ce n’était pas évident de le réaliser.
Car, il a été négligé au début et l’accompagnement est venu en cours de réalisation.
Produit par le Groupe Lydel Com et financé avec une post-production réalisée par le Centre Yennenga, Le Mouton de Sada, selon son réalisateur, sera dans toutes les salles de Canal Olympia d’Afrique de l’Ouest, jusqu’au 10 décembre. Il sera également projeté du 4 décembre 2023 au 24 janvier 2024 dans les centres culturels régionaux du Sénégal, mais aussi sera disponible sur la plateforme Wido.
Lequotidien