La désalinisation des terres de la vallée de Baboulaye a permis aux cultivateurs de cette localité du Centre-Ouest d’être autosuffisants en riz.De Diofior, commune située à environ 150 kilomètres au Sud-Ouest de la capitale Dakar, la route qui mène vers la vallée de Baboulaye est chaotique. Mais une fois arrivé, le contraste est saisissant. De vastes étendues d’eau d’où émergent des cultures de riz en maturation offrent un paysage idyllique à perte de vue. Ici, seuls les gazouillis d’oiseaux saisonniers, le vent léger qui caresse les oreilles et les pélicans rôdant autour des vaches en pâturage interrompent le calme plat.
Cet immense espace rizicole, autrefois envahi par le sel du fleuve Saloum et de son principal affluent, le Sine, est redevenu propice à l’agriculture grâce à divers projets dont le Programme multinational de Renforcement de la Résilience à l’Insécurité Alimentaire et Nutritionnelle au Sahel (P2RS) financé par le Fonds africain de développement (Fad) à hauteur de 40 millions de dollars. Le P2RS conduit des actions adaptatives au changement climatique dans six régions du Sénégal. C’est dans ce cadre que la vallée de Baboulaye, dans la région de Fatick, a eu à bénéficier d’importantes infrastructures hydroagricoles dont trois digues. La première, anti-sel et longue de 900 mètres, empêche l’infiltration de l’eau de mer et du sel. Les deux autres permettent la régulation des eaux grâce à des vannes déversoirs. « Lorsque la digue anti-sel a été aménagée, la langue salée était pratiquement sur trois kilomètres.
Les premiers lessivages, consécutifs aux premières pluies, nous ont permis de récupérer les parties peu et moyennement salées qui tournent autour de 300 hectares. Actuellement, nous avons 685 hectares cultivables », se réjouit Aly Diallo, chef d’antenne régional du P2RS. Pour profiter au maximum de ces terres reconquises, l’Institut sénégalais de recherche agricole (Isra) a développé deux variétés de riz : ISRIZ 10 et WAR 77. « ISRIZ 10 est très productive et ses graines contiennent des épines. Cela les préserve des oiseaux granivores. La WAR 77 est, quant à elle, adaptée aux zones les plus profondes. Même avec un excès d’eau, cette variété se développe correctement », explique Docteur Alfred Kouly Tine, chargé de recherches à l’Isra de Bambey (Centre). Nette amélioration des productions Grâce à ces différentes initiatives, les résultats ne se sont pas fait attendre. D’une tonne à l’hectare avant la mise en œuvre du projet en 2015, les rendements agricoles sont passés à 3 tonnes par hectare voire 5 tonnes dans certaines zones.
« En 2020, il y a eu des familles qui ont utilisé le riz qu’elles ont produit pour une couverture alimentaire de plus d’un an », souligne le chercheur de l’Isra. « La commune de Diofior a atteint l’autosuffisance alimentaire en riz. Et la vallée de Baboulaye est devenue notre grenier », assure Babou Gningue, un producteur qui accompagne les coopératives de riziculteurs. À l’en croire, les terres récupérées sont désormais disponibles pour la riziculture pluviale avec un système d’aménagement permettant une retenue d’eau pour environ trois mois. Le riz produit à Diofior est pour le moment destiné à la consommation locale. La commercialisation reste cependant un objectif sur le long terme. « Quand on y arrivera, cela voudrait dire que l’on se dirige vers la sécurité alimentaire », estime Babou Gningue. Dans le cadre de ce projet, 100 hectares de terres ont été reboisés avec chacun 1100 arbres, créant ainsi une véritable ceinture verte sur une grande partie de la vallée.
En visite dans la zone, les délégués du Fonds africain de développement ont loué les progrès accomplis et qui ont permis de transformer la situation agricole de Diofior. « C’est un réel plaisir de venir constater ce qui a été effectivement réalisé sur le terrain et s’assurer de la manière dont les financements alloués par le Fad ont été dépensés. De bons partenariats, une préparation de qualité du projet au départ permettent de construire la durabilité des projets au profit des bénéficiaires », déclare Veronika Baumgartner Putz, déléguée du Fad pour l’Autriche. Au Sénégal, la plupart des objectifs du P2RS ont été atteints ou dépassés. Selon son Coordonnateur national, Younoussa Mballo, plus de 7000 hectares de terre ont été récupérés sur un objectif initial de 9000 hectares. De même, 547 périmètres maraîchers ont été aménagés au lieu de 500.
Vingt-trois digues ont également été construites à la place des 16 prévues par le projet. « Globalement, c’est un projet qui a été exécuté dans les délais (5 ans) avec un taux de décaissement qui avoisinait les 100 % », note Younoussa Mballo. Selon lui, quelque 240 mille producteurs et plus de 60 mille ménages ont été atteints par ce projet ayant permis de réaliser d’autres programmes de développement liés à l’aquaculture, l’élevage, le renforcement de capacité des bénéficiaires sur l’ensemble du territoire national.
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