A Joal, les habitants sont satisfaits d’avoir découvert en grande première le film «Sos Yaboye» de Thomas Grand, projeté samedi dernier. Occasion pour l’observateur averti de l’économie maritime du Sénégal et réalisateur du documentaire «Poisson d’or, poisson africain», d’inviter les autorités à prendre les mesures idoines pour mieux gérer ces ressources halieutiques qui font vivre beaucoup de Sénégalais mais aussi de la région ouest-africaine.

 Poisson d’or, poisson africain, le documentaire sur l’économie de la pêche et plus particulièrement de la sardinelle (Yaboye), réalisé par Thomas Grand et Moussa Diop, a remporté plus d’une cinquantaine de prix à travers le monde. Le cinéaste va plus loin dans son combat. A travers une nouvelle réalisation, Sos Yaboye, il donne la parole aux pêcheurs, femmes transformatrices, mareyeurs, mais aussi à toutes les personnes qui dépendaient de la mer pour sensibiliser sur l’importance de la protection des ressources halieutiques. «J’ai créé un média citoyen qui s’appelle Sos yaboye et qui parle du yaboye parce que c’est la ressource la plus importante du pays en matière d’emploi et de sécurité alimentaire.

Dans Sos yaboye, il y a trois ressources prioritaires, les plus importantes de Joal et qui sont actuellement en danger, c’est-à-dire le yett (cymbium), le yaboye et tous les produits de la mangrove», a expliqué Thomas Grand, le réalisateur, lors de la projection du film, samedi dernier à Joal. Il s’agit d’un film de 55 minutes qui raconte le quotidien de ces hommes et femmes qui pensent uniquement à sauver la sardinelle, communément appelée yaboye en wolof, mais aussi à pousser à la prise de conscience collective, à la prise de décision pour construire une économie verte dans les secteurs du fumage artisanal de poisson et de la transformation des produits halieutiques. «Surtout sur ces ressources qui sont presque épuisées», ajoute-t-il. Selon le réalisateur, Joal est construit économiquement et au niveau de sa population grâce à la sardinelle.

«On va essayer de remonter cette voix au niveau des politiques et faire voir ce film au niveau de nos télévisions même si c’est difficile de créer un créneau», fait part Thomas Grand dont le film sonne comme un appel à la mobilisation contre l’implantation des usines de farine et d’huile de poisson, mais aussi à la sensibilisation des professionnels de la pêche sur la rareté du poisson dans les eaux sénégalaises. «C’est un pillage, depuis une trentaine d’années, par la pêche industrielle abondante avec la responsabilité partagée des pêcheurs sur les techniques de pêche et dernièrement, l’implantation des usines de farine et d’huile de poisson a mis une pression supplémentaire», a-t-il justifié.

Un appel à la mobilisation
Le film lance un message à l’endroit des autorités afin que des mesures strictes soient appliquées, avec notamment le décret qui reconnaît les métiers des femmes transformatrices, l’application du Code de la pêche. «Si rien n’est fait, le ministre de la Pêche même va disparaître parce qu’il n’y aura plus de poisson dans nos eaux», a affirmé Abdou Karim Sall, personnage du film et par ailleurs président de la Plateforme des pêcheurs artisanaux du Sénégal (Papas). D’après M. Sall, il y a des décideurs qui ne savent pas ce qui se passe, surtout par rapport aux débarquements. «S’il n’y a pas de guerre au Sénégal, c’est parce que les gens ont de quoi manger et c’est le yaboye. 97% des populations de Joal dépendent de la pêche, directement ou indirectement. Le premier secteur d’exportation au Sénégal c’est la pêche et quand on parle de la pêche, on parle du yaboye. Cette sardinelle est très importante pour le Sénégal», souligne-t-il.

«Ce film doit pousser à l’introspection»
Dans Sos yaboye, on perçoit que des pirogues peuvent rester deux jours en mer sans attraper de poissons. Au vu de cette situation «préoccupante», Greenpeace a jugé bon d’agir en lançant la campagne «Ana sama Jën» (Où est mon poisson ?). Et cette question brûle les lèvres de tous les pêcheurs, mareyeurs, en passant par l’écailleuse, les femmes transformatrices et les clients. «Le film Sos yaboye pour moi, recoupe exactement ce que vivent les Sénégalais. Où est passé ce poisson jusqu’à ce que le pêcheur le traque ?», demande Abdoulaye Ndiaye, chargé de campagne à Greenpeace Afrique, et qui invite également l’Etat du Sénégal à impliquer tous les pêcheurs dans toutes les instances de décision, mais aussi de gérer les ressources d’une manière transparente. Ce film, dit-il, doit pousser à l’introspection et à l’action parce que la plus grosse crainte, c’est que «demain, ces pêcheurs continuent à emprunter le chemin de l’océan pour aller en Europe par désespoir. Quand on regarde ce film, il y a un désespoir qui commence déjà à s’installer», témoigne-t-il.

lequotidien

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