Des producteurs de Diender ont choisi de s’investir dans l’agroécologie, en utilisant des techniques qui tiennent compte de la préservation de l’environnement, des écosystèmes et répondent aux exigences économiques et sociaux. A Diender, commune située à environ 30 kilomètres de la ville de Thiès, ils sont nombreux, les paysans qui s’activent de plus en plus dans l’agriculture biologique.

En cette fin d’après-midi, un microclimat souffle sur le village de Mibidieum. Assis à l’ombre d’un manguier, Alioune Ndiaye, colonel à la retraite, joue aux mots fléchés. Agé de 68 ans, M. Ndiaye s’active dans l’arboriculture et dans l’agriculture biologique depuis sa retraite de l’administration en 2013. Il est membre de la fédération des agropasteurs de Diender, une association qui joue un rôle important dans la promotion des économies vertes dans la zone des Niayes.

Colonel Ndiaye affirme que l’agriculture biologique n’est pas forcément une nouveauté dans cette zone, car elle était déjà pratiquée par ses ancêtres. ‘’Nos grands-parents pratiquaient l’agriculture biologique sans le savoir. Je me rappelle bien du temps où l’administration distribuait de l’engrais, mais personne n’y touchait’’, explique-t-il.

Avec les changements climatiques à l’échelle planétaire, les Etats et les organisations de défense de l’environnement plaident pour la vulgarisation des économies vertes et des activités de développement durable.

D’après l’Aps, Colonel Alioune Ndiaye fait principalement de l’arboriculture biologique. Dans ses champs, on retrouve des citronniers, des manguiers, des anacardiers, des orangers et des papayers. Il n’utilise pas les engrais chimiques et les pesticides. ’’Certains paysans forcent le sol avec l’utilisation des engrais chimiques. Mais ces méthodes tuent la terre, car chaque année, il faut en mettre plus’’, avance-t-il.

Utilisation des fertilisants naturels

Dans la commune de Diender, les paysans utilisent plusieurs méthodes pour obtenir de l’engrais naturel. Cette technique leur permet aussi de garder les légumes aussi longtemps que possible, après la récolte.

Pour vulgariser ces pratiques, des formations sur le compostage, le phosphatage sont organisées pour renforcer les capacités des producteurs locaux.

La fédération des agropasteurs de Diender dit même disposer des unités de compostage dans la commune de Mbawane et dans celle de Bayakh. ’’Vous coupez les herbes, vous les broyez, vous les mélangez avec le sol, vous avez de l’engrais naturel. Vous récupérez les bouses de vaches, de moutons, des ânes, vous en faites un bon traitement. Cette technique fertilise le sol également’’, souligne le colonel Alioune Ndiaye.

Autre localité où l’agriculture bio tente de bousculer l’agriculture conventionnelle, le village de Keur Moussa, situé à un (01) Km de Diender. ’’Dans notre localité, la plupart des paysans sont dans l’agriculture conventionnelle’’, signale cet agriculteur trouvé sur place, la bèche sur les épaules sous un soleil au zénith.

Pourtant, dans cette même localité, Mame Coumba Guèye, mère de famille, est citée comme exemple dans l’agriculture biologique. Elle s’active surtout dans la culture de l’oignon et dit n’utiliser que des fertilisants bio. ’’Avant de faire la semence, on fait d’abord le compostage avec les feuilles d’arbres, la paille, les écailles des poissons et les déchets des animaux. Ce mélange vous donne de l’engrais biologique très rentable et très efficace pour la durabilité des sols’’, explique-t-elle.

’’Ceux qui s’activent dans l’agroécologie dans ce village, ne sont pas nombreux. Au début, c’était seulement les femmes qui utilisaient ce système, mais avec l’appui de la fédération dans la formation et dans la sensibilisation sur les cultures biologiques, les gens commencent à comprendre les avantages de ce système’’, poursuit-elle.

La Fédération nationale pour l’agriculture biologique (FENAB), créée en mars 2008, regroupe des organisations de producteurs, de vendeurs, de transformateurs, de consommateurs et d’organisations d’appui. Le siège de cette fédération se trouve à Thiès. Elle œuvre pour le développement de l’agriculture biologique au Sénégal. Dans la zone des Niayes, ils sont nombreux, les paysans qui s’adonnent aux cultures conventionnelles avec l’utilisation d’engrais chimiques.

Mais, à en croire le coordinateur du FENAB, Ibrahima Seck, cette technique a montré ses limites. ‘’Cette forme d’agriculture qui utilise des engrais chimiques, des herbicides et d’autres intrants chimiques, a fini de polluer nos terres arables. Ces techniques dégradent notre biodiversité animale et végétale’’, dénonce le coordinateur.

Selon Ibrahima Seck, les cultures biologiques favorisent la biodiversité et réduisent les risques environnementaux. ’’L’agroécologie est un système de production agricole qui permet la résilience face aux chocs exogènes, mais aussi facilite notre adaptation aux changements climatiques. Ce système permet aux producteurs de mettre sur le marché, à chaque période, des produits à des prix rémunérateurs’’, soutient-il.

Pour la formation des producteurs

La fédération des agropasteurs de Diender a été créée en 1982, suite à une grande sécheresse qui affecta la zone des Niayes, entraînant une baisse de la production. Elle appuie les producteurs de Diender dans la formation et dans la sensibilisation.

Mactar Ndoye, habitant Mibidiem dans la commune de Diender, est le président de la fédération depuis 2015. ’’Dans le cadre de la promotion des économies vertes, nous avons formé 370 producteurs de mangues et plus de 600 producteurs de légumes. Nous avons formé avec l’appui de nos partenaires, 300 femmes dans l’agriculture biologique’’, explique Mactar Ndoye.

’’Dans la zone de Diender, nous cultivons des choux, des oignons, de la mangue, de la pomme de terre, du poivron et d’autres légumes. Pour les cultures biologiques, nos récoltes peuvent aller jusqu’à 160 tonnes par saison’’, a-t-il-ajouté.

Utilisation des énergies renouvelables dans le maraîchage

L’utilisation des énergies renouvelables, comme le solaire, dans les champs de Diender reste un grand défi pour la fédération des agropasteurs de la localité.

A Diender, la transition écologique est déjà une réalité chez beaucoup de paysans. Le colonel Alioune Ndiaye dispose d’un système solaire, qui lui permet d’irriguer son champ et d’économiser de l’eau. ’’Avec le solaire, tu dépenses moins et surtout, c’est une méthode très efficace et cela te permet d’économiser de l’eau dans l’arrosage des plantations’’, dit-il.

’’Nous sommes en train de sensibiliser les populations pour qu’elles aillent vers le solaire. J’avoue que ce n’est pas facile, mais elles vont comprendre dans le futur, j’en suis persuadé’’, ajoute-t-il avec un large sourire.

Agriculture biologique pour la nutrition

Un projet a été mis en place, en 2015, dans le cadre d’une coopération avec l’Organisation des Nation Unies pour l’alimentation et de l’agriculture (FAO), pour lier l’agriculture biologique et la nutrition, avec la formation de plus de 300 femmes dans le cadre de cette initiative. ’’On a combiné l’agriculture biologique avec la nutrition. On a formé les femmes qui travaillent dans la cuisine sur ce dont l’homme a besoin pour son alimentation et surtout, les jeunes’’, a fait savoir Mactar Ndoye.

Mame Coumba Guèye fait partie des femmes qui ont bénéficié de cette formation. Elle maîtrise les techniques nutritionnelles avec l’utilisation des produits biologiques. Selon elle, l’alimentation biologique est ’’très efficace’’, surtout pour les enfants atteints de la malnutrition. ’’On prépare des plats à base d’arachide et d’haricots. Ces plats constituent des sources importantes de protéines et de fibres alimentaires et peuvent aider certains enfants à grandir sans effets secondaires sur la santé’’, souligne-t-elle.

Un marché bio pour une meilleure commercialisation

Les paysans qui s’activent dans l’agriculture biologique dans la zone des Niayes ,veulent avoir un bon cadre pour la commercialisation de leurs produits. ‘’Nous voulons un marché biologique. Cela nous permettra de valoriser nos produits’’, dit M. Sadio, un producteur de la commune de Bayakh.

Au marché Notto Gouye Diama, principal point de ventes, les produits bio comme les produits conventionnels, sont vendus au même prix. Ce qui ne favorise pas les agriculteurs biologiques. ’’Les légumes bio sont de bonne qualité, mais, malheureusement , nous n’avons pas un bon cadre pour les commercialiser. Par conséquent, nous ne vendons pas bien. L’Etat doit nous aider à avoir un marché pour la commercialisation des cultures biologiques’’, plaide-t-il.

Les agriculteurs restent optimistes et espèrent une forte adhésion des populations au système agriculture biologique. Ils sollicitent aussi l’appui des autorités compétentes, pour avoir de bons circuits de vente des produits biologiques, dans la zone des Niayes.

leral

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