La faculté des lettres et sciences humaines de l’université Cheikh Anta Diop de Dakar (UCAD) a abrité ce matin une conférence suivie de débat sur le thème : « la littérature-Monde : enjeux et perspectives d’un concept de rupture ». Elle a été animée par l’écrivain congolais Alain Mabanckou qui a entamé une tournée africaine sur les « débats d’idées ».

La question de la place et de l’expression des langues africaines dans cette « littérature-Monde » a été entre autres à l’ordre du jour. C’est ainsi que l’historien Ndiouga Benga s’interroge sur la place “de nos langues” dans Littérature-Monde.

L’écrivain, Alain Mabanckou répond par « l’affirmative » mais révèle que « malheureusement nous sommes beaucoup d’auteurs africains qui ont appris à écrire et à lire par le biais de la langue coloniale ».

C’est dire que les langues «sont réduites pour la plupart à des langues de l’orale ». Pour l’écrivain « il est souvent difficile de devenir écrivain sans passer par la langue écrite que vous avez apprise, qui vous a ouverte aux écrits et au monde ».

Alain Mabanckou estime que s’il y avait « le lingala écrit, le souahili écrit…il y aurait déjà une littérature foisonnante de romans et d’essais». Ce qui permettra à la pensée de « commencer à photographier l’aspect structural de de la parole ».

Il est évident que des littératures existent « en wolof, en zoulou », mais «elles font partie de la littérature bonne » ajoute-t-il.

Autrement dit « c’est une multiplication des imaginaires qui sont convoquées à se rencontrer ». Cela même lorsque « l’écrivain écrit en français, il n’est pas exclu que le rythme de sa phrase écrite provient des langues originelles qu’il a apprises».

Dans cette perspective il révèle que « la plupart de mes romans écrits en français ont été pensé dans les langues africaines si bien que j’ai l’impression d’être un petit traducteur qui dès que je pense à une réalité, elle sort automatiquement en français, car le processus de passage s’est fait dans l’intimité de la création ».

C’est ce qui montre que « nous avions appris à héberger l’inventeur de nos langues à l’intérieur ».

Peut-être que « l’écrivain africain est un écrivain polyglotte voire polymorphe ». Donc il a en lui un « répertoire d’imaginaire ».

Prenant exemple sur les langues de son pays, monsieur Mabanckou parle de la tendance de certains à penser à une « identité unique du moment que vous habitez en Afrique tandis que ceux qui seraient du côté de l’Europe auraient des identités superposées », explique-t-il.

Sa conviction est qu’on « peut vivre en Afrique et ne pas avoir l’identité unique et même y avoir des identités superposées».

L’explication est la suivante « entre nous, le sénégalais présent à un ami béninois avec qui il travaille, qui ira voir à son tour un congolais, lequel verra son ami le gabonais » ce qui crée dès lors « une superposition d’univers intra-africain qui font que notre littérature a beaucoup conversé avec l’Europe mais n’a pas conversé à l’intérieur de l’Afrique ».

Par la suite, beaucoup d’autres questions ont été abordées que ce soit par les professeurs que par les étudiants venus nombreux converser avec lui.

pressafrik

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