Une étude menée par le CHU de Bordeaux avec l’OMS et le Centre de toxicomanie et de santé mentale (CAMH), montre que les alcooliques qui arrêtent de boire, réduisent considérablement leur risque de cancer lié à l’alcool.
Réduire ou stopper sa consommation d’alcool est lié à une diminution du risque de tous les cancers imputables à la boisson, y compris ceux du foie et de la gorge.
C’est ce qu’assurent les équipes du CHU de Bordeaux qui viennent de publier dans la revue The Lancet la première étude de cohorte nationale en France sur le sujet.
Arrêt de l’alcool : une baisse de près de 40 % de certains types de cancers
Pour évaluer le lien entre la diminution de la consommation d’alcool et le cancer, les données concernant plus de 24 millions de Français adultes et sortis de l’hôpital entre 2018 et 2021 ont été analysées.
Les chercheurs ont découvert qu’environ 6,3 % des hommes et 1,6 % des femmes étaient dépendants à l’alcool. Cette addiction est fortement associée aux cancers liés à l’alcool chez les deux sexes.
Toutefois, ce risque accru n’est pas immuable.
L’équipe a en effet constaté que les personnes qui suivaient un traitement contre l’alcoolisme ou avaient des antécédents d’abstinence étaient significativement moins susceptibles de développer un cancer que celles toujours dépendantes à la boisson.
« Une telle intervention pourrait prévenir un nombre important de carcinomes hépatocellulaires et de cancers de la bouche, du pharynx, du larynx, de l’œsophage et du cancer colorectal. Cela pourrait également réduire le risque de cancer du sein féminin, bien que les preuves soient moins claires », explique Catherine Hill de Gustave-Roussy dans un commentaire accompagnant l’article.
Pour les chercheurs français qui ont aussi travaillé avec l’OMS et les Canadiens du CAMH, leurs travaux confirment l’efficacité des stratégies thérapeutiques contre la dépendance à l’alcool dans la prévention du cancer et devraient être proposées plus largement aux personnes ayant des problèmes avec la boisson.
« On sait que le traitement de la dépendance à l’alcool est efficace, mais le fait que la dépendance à l’alcool soit une maladie chronique récurrente nous fait souvent oublier que même en cas de rechutes, les périodes d’abstinence diminuent nettement le risque de cancer et d’autres maladies chroniques », reconnaît le Dr Jürgen Rehm de CAMH.
« D’un point de vue de santé publique, notre recherche met en évidence une négligence troublante de la dépendance à l’alcool par rapport à d’autres problèmes de santé, tant dans la recherche que dans les priorités politiques », ajoute le Dr Michaël Schwarzinger, auteur principal de l’article et responsable de l’unité hospitalière d’innovation en prévention au CHU de Bordeaux.
« Par conséquent, la dépendance à l’alcool continue d’être une épidémie silencieuse et terrible dans des pays comme la France, d’autant plus que le niveau annuel moyen de consommation d’alcool par habitant chez les adultes dans ce pays est plus de deux fois supérieur à la moyenne mondiale. »
« Cette étude souligne que la réponse des systèmes de santé est également cruciale pour réduire le risque de cancers imputables à l’alcool.
En augmentant l’accessibilité aux interventions de réadaptation alcoolique et d’abstinence dans les établissements de soins de santé, les pays pourraient faire davantage pour protéger leurs populations contre les cancers évitables.
C’est pourquoi nous appelons à plus d’investissements dans les services de réadaptation et de traitement des troubles liés à la consommation d’alcool en France et dans d’autres pays de la Région européenne de l’OMS », conclut le Dr Carina Ferreira-Borges, spécialiste des troubles liés à l’alcool au Bureau régional de l’OMS pour l’Europe.
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